Les "chefs de terre" du département d’Agboville ont formalisé, le dimanche 23 novembre 2025, leur demande d'intégration à la Chambre nationale des rois et chefs traditionnels de Côte d’Ivoire (CNRCT-CI). Cette requête, présentée au terme d’un atelier de deux jours, vise à reconnaître officiellement leur rôle crucial dans la gouvernance villageoise des peuples Abbey et Krobou.

Un pouvoir bicéphale à reconnaître

Le cœur du plaidoyer réside dans la reconnaissance du modèle de direction villageoise bicéphale (à deux têtes) qui prévaut dans ces communautés.

« Chez les Abbey et Krobou, la direction villageoise est bicéphale. Il y a les Ohochis, qui sont les chefs de village administratifs, et les nanans qui sont les chefs traditionnels », a expliqué Nanan Bodou Bodou Clément, président des chefs de terre du département.

Il a souligné que la coexistence et la conjugaison des forces de ces deux entités donneraient un poids supplémentaire à la Chambre nationale, assurant ainsi une représentation complète de la tradition.

Restaurer l'autorité et s'associer à la gestion foncière

Au-delà de leur intégration à la CNRCT-CI, les chefs de terre ont formulé d'autres revendications majeures :

1. Restauration de leur autorité et de leur prestige social.
2. Association à la gestion foncière des localités.
3. Renforcement de la redevabilité des chefs de village envers les chefs de terre dans la gestion quotidienne.

Un appel soutenu par les autorités

L'initiative des chefs de terre a reçu un accueil favorable de la part des autorités locales, qui ont salué la mise en lumière du rôle fondamental du "Nanan" (chef traditionnel).

Pierre Dimba, président du conseil régional de l’Agnéby-Tiassa, a reconnu leur place « cruciale » dans la perpétuation des valeurs culturelles. Il s'est dit favorable à leur prise en compte « à l’image des rois dans d’autres contrées » et a même évoqué la mise en place d'un comité de suivi des résolutions de l'atelier. Il a insisté sur la nécessité d’une cohabitation harmonieuse entre les chefs de terre et les chefs de village pour un développement pacifique.

De son côté, le préfet d’Agboville, Sihindou Coulibaly, a assuré les chefs de terre de l’appui de l’administration préfectorale, des élus et des cadres, jugeant leur demande « légitime ». Il a cependant mis en garde contre toute opposition qui pourrait naître avec les chefs de village, soulignant qu'il y a « de la place pour tout le monde ».

L’atelier, placé sous le thème “Harmonisation des pratiques traditionnelles des chefs de terre du département d’Agboville”, a rassemblé près de 200 chefs de terre et a marqué une étape décisive dans leur quête de reconnaissance institutionnelle.