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Société

Côte d’Ivoire : le campus de Cocody « respire mieux » sans la FESCI (REPORTAGE)

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Côte d’Ivoire : le campus de Cocody « respire mieux » sans la FESCI (REPORTAGE)
Le campus de l’Université Félix Houphouët-Boigny de Cocody, la plus grande université publique ivoirienne, « respire mieux », au lendemain de la dissolution des syndicats estudiantins dont la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI) entérinée par le Conseil national de sécurité, a constaté vendredi, un journaliste de l’Agence de presse Top News Africa, sur place dans la capitale économique ivoirienne.

Ce vendredi 18 octobre 2024, quelques heures après la décision de dissolution des organisations syndicales estudiantines, il y a une petite frénésie à certains endroits du campus de l’université Félix Houphouët-Boigny, due à plusieurs soutenances de mémoires et de thèses. 

Toutefois, l’ambiance est plutôt bon enfant. Rien donc à voir avec les périodes d’antan, où il fallait compter avec d’éventuelles perturbations des ‘’éléments’’ de la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI). 

« En temps normal, tout pouvait partir en vrille, de manière imprévue, dès que la FESCI entrait en scène. Là au moins, depuis deux semaines, nous respirons mieux un air de liberté. On est sûr de mener les activités académiques sans risque d’être perturbés », commente un enseignant, membre d’un jury de soutenance de mémoire. 

Cette fin de la ‘’terreur’’ sur le campus, Annabelle l’apprécie particulièrement, après avoir été passée à tabac par un ‘’gradé’’ du mouvement estudiantin.

 « Je savoure ce moment. Avant la suspension de leurs activités, c’est régulièrement qu’ils patrouillent sur le campus, pour y faire respecter leur diktat. Les matins ou les soirs, l’on pouvait les apercevoir en train de faire leur footing aux allures martiales », confie la jeune fille qui s’attèle à boucler les préparatifs de la soutenance de son Master, ce vendredi 18 octobre 2024. 

« C’est dommage que ce moment coïncide avec ma soutenance qui va marquer mon départ du campus, au moins pour un moment mais, je suis tout de même heureuse de savoir que nos jeunes frères et sœurs qui viendront ici pour leurs études, ne seront plus autant embêtés », ajoute Annabelle, malmenée par un responsable de la FESCI pendant une séance de footing de ce "puissant syndicat". 

A l’en croire, le mauvais quart d’heure qu’elle a passé aux mains du ‘’gradé’’ de la FESCI, appellation pour désigner les hauts responsables du mouvement, est lié à une banalité. 

« Il m’a reproché de l’avoir dévisagé et d’avoir fait pareil pour ceux qui faisaient le footing. Ce qui est totalement faux », conte la jeune fille qui déteste le syndicat estudiantin depuis ce jour de 2022 où elle a été passée à tabac avant d’être délestée de son téléphone portable. 

Deux témoignages bien courageux, si l’on en juge la méfiance et la précaution que les autres interlocuteurs ont souhaité prendre avant d’évoquer le puissant mouvement estudiantin. 

« Effectivement, leur mode opératoire s’apparentait à celui des milices. Ils avaient un système d’information digne des grandes organisations. Ils étaient informés en temps réel sur la vie sur le campus de Cocody. Cela veut dire qu’ils ont des hommes partout. Parfois, leur réseau d’information dépassait même le simple cadre de notre université », confie un chercheur qui a requis l’anonymat à l’agence de presse Top News Africa, en assurant qu’’’on ne sait jamais’’. 

Pourtant, une présence discrète de la police nationale, est là pour rassurer tous ceux qui ont été traumatisés par le passé par l’organisation estudiantine. Et pour dissuader quelques téméraires parmi les membres de ce syndicat.

 « Ceux qui étaient à la tête de la FESCI étaient tout simplement des voyous. A quarante ans révolus, comment peut-on revendiquer encore le statut d’étudiant et qui, plus est, en Master. C’est le cas pour la plupart d’entre eux. S’ils faisaient croire qu’ils étaient en années de thèse, on pouvait encore leur accorder le bénéfice du doute. Mais, avoir 45 ans et être encore en Licence ou en Master, c’est abusé. C’était tout sauf de vrais étudiants », accuse un travailleur d’une structure située aux alentours du campus de Cocody.

 « Depuis que je les ai vu malmener un père de famille venu emprunter le bus à sa descente du boulot non loin du CHU de Cocody, je me suis convaincu que ces gens n’étaient ni plus, ni moins que des voyous », témoigne-t-il, l’air encore enragé. 

Dans ce concert de condamnation du mouvement estudiantin, il existe cependant des voix pour prendre un peu sa défense. 

« Certes, ses dirigeants, ces dernières années, ont fait basculer le mouvement dans la violence, érigée en véritable mode de fonctionnement mais, il ne faut pas oublier tous les acquis à mettre à l’actif de la FESCI. Si les étudiants en sont toujours à payer la carte de bus au coût qui est pratiqué actuellement (ndlr 3000 FCFA), c’est grâce au combat de la FESCI. Pareil pour les frais de scolarité et bien d’autres acquis. On ne devrait pas jeter le bébé avec l’eau du bain, il faut savoir raison garder », estime un enseignant de lycée rencontré hors du campus de Cocody. 

C’est également loin de l’enceinte de l’Université Félix Houphouët-Boigny que Maéva accepte de témoigner. En stage dans une entreprise et en instance de ‘’soutenance’’ de son rapport de Brevet de technicien supérieur (BTS), elle fait partie des occupants dits illégaux évacués manu-militari pour certains des résidences universitaires le 5 octobre 2024. 

« Je ne les dédouane pas mais, ils n’étaient pas tous mauvais. Nous qui ne connaissons personne de haut placée pour nous aider, on pouvait passer par eux, pour trouver une chambre en cité », affirme la jeune fille, qui a dû aménager chez une amie, le temps de s’organiser pour se trouver un petit appartement.

 « A deux reprises, j’ai sollicité une chambre en bonne et due forme, en vain. Il a fallu que je passe par ce circuit pour avoir la chambre que j’occupais avant l’expulsion », raconte la jeune fille qui prépare d’autres diplômes en cours du soir et dont les parents, sont installés au Sud-Est du pays. 

Une réunion du Conseil national de sécurité (CNS), a entériné, ce jeudi 17 octobre 2024, la dissolution de toutes les associations estudiantines sur l’ensemble du territoire national. Cette décision est intervenue après plus de deux semaines de suspension des activités de ces organisations par le gouvernement. 

Ces mesures font suite aux violences observées ces douze derniers mois sur le campus de Cocody, liées au contrôle du mouvement et qui ont fait au moins deux morts. 

Cités dans ces meurtres, plusieurs responsables dont le secrétaire général de la FESCI, Kambou Sié, ont été arrêtés et placés en détention en attendant leur procès.

Ce n'est pas la première fois que la FESCI est dissoute par les autorités ivoiriennes. En 1991 déjà, le Premier ministre de l’époque, Alassane Ouattara, avait prononcé la dissolution du mouvement, suite au meurtre de l’étudiant Thierry Zébié, après plusieurs heurts. 

Cependant, après près de cinq ans de clandestinité, la FESCI, sous la houlette de Guillaume Soro qui en était devenu le secrétaire général, a été autorisée à reprendre officiellement ses activités.
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