À première vue, elle n'a rien d'offensif. Mais sous son emballage aux couleurs vitaminées et ses airs de soda énergisant, se cache un cocktail explosif et nocif pour la santé. Voici la Vody, la nouvelle boisson prisée des jeunes, qui contient 18 à 22% d'alcool, de la vodka ainsi que de la caféine, de la taurine ou encore du sucre. Ces canettes, vendues entre 3 et 5 euros, sont interdites aux moins de 18 ans, mais les adolescents en raffolent. 

Une enquête ouverte par la DGCCRF

"Je n'ai pas le droit de vendre aux mineurs", assure au micro du 20H de TF1 la caissière d'une supérette parisienne. Pourtant, la plupart des lycéens que TF1 a rencontrés affirment n'avoir jamais été contrôlés à la caisse d'un commerce. "Tout le monde peut en acheter, en vrai. Dès qu'on va dans une petite épicerie, c'est bon", confie un adolescent, tandis qu'un autre souligne qu'ils "ne demandent pas la carte".

Depuis l'arrivée de la Vody dans nos rayons, la Répression des fraudes s'interroge sur la vente de ces boissons en libre-service, aux côtés de sodas et autres boissons énergisantes. Or, en Europe, la loi est claire : au-delà de 15% d'alcool, une boisson doit être classée parmi les spiritueux. Une enquête a donc été ouverte le 1er mai, en collaboration avec l'Allemagne, pays dans lequel la Vody est fabriquée. "Si le produit devait être commercialisé comme une 'boisson spiritueuse', il devrait ainsi répondre à des réglementations strictes visant à protéger les consommateurs", a déclaré la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).

Au Point(nouvelle fenêtre), la DGCCRF a confirmé vouloir "vérifier que la dénomination de vente du produit est correcte". Auprès de l'association France Assos Santé(nouvelle fenêtre), elle a souligné chercher à "identifier le réseau de distribution et les responsables de la mise sur le marché français" de cette boisson, qui a notamment connu un fort succès dans les Antilles avant de débarquer dans l'Hexagone.

Des parfums fruités pour attirer les plus jeunes

Pour les médecins, l'alcool n'est pas le seul danger de la Vody. Le mélange peut provoquer de graves problèmes de santé. "Ça va accélérer le métabolisme, la fréquence cardiaque. Ça va nous mettre dans un état d'alerte. Pour le cœur, c'est une surcharge parce que ça va donner de la tachycardie. Et on peut imaginer que si la personne est déshydratée ou si elle a une fragilité au niveau cardiaque, on risque des palpitations, des troubles de rythme, voire un infarctus si on est trop stimulé", détaille la Dr Victoria Tchaïkovski, médecin du sport à Paris.

Dans un square, l'équipe du 20H de TF1 rencontre une vingtaine de collégiens. Même si la Vody est interdite aux mineurs, tous ou presque disent en consommer régulièrement et racontent avoir subi les effets causés par cette boisson. "Moi, j'en ai consommé mardi, avant les cours. J'ai fait un malaise. J'ai été viré deux jours du collège", admet l'un de ces jeunes. Ils montrent ensuite la vidéo d'une jeune fille qui, ce soir-là, venait tout juste d'être prise en charge par les secours après avoir bu de la Vody. "On a appelé les pompiers", se souviennent les adolescents.

Des vidéos où l'on voit des jeunes consommer plusieurs canettes d'affilée font le tour des réseaux sociaux. Ce dangereux cocktail est caché derrière une présentation ludique qui reprend les codes des boissons énergisantes : des illustrations festives, des parfums fruités pour attirer les jeunes. En outre, cette boisson est vite addictive, selon les spécialistes. Chaque canette comprend plus de 20 grammes de sucre, un ingrédient qui masque les sensations liées à l'alcool. 

"On boit ça limite comme du petit lait. On n'a pas l'impression de boire quelque chose qui est extrêmement fort. Et la caféine qui est présente dans la boisson va masquer les effets de l'alcool. C'est ça qui est pernicieux, c'est qu'on boit de l'alcool sans s'en rendre compte. C'est comme si on servait quatre à cinq verres de vodka", explique Laurent Muraro, coordinateur général de la fédération Entraid'Addict, selon lequel "on peut être en coma éthylique juste avec deux boissons comme ça". 

Contacté, le fabricant de cette boisson n'a pas donné suite à nos sollicitations. "Nous ne sommes pas disponibles pour une interview", peut-on en effet lire dans leur e-mail. Dans certains pays, en particulier l'Allemagne, cette boisson est interdite à la vente.