Motivé par des arguments fallacieux, la décision de Bamako de mettre fin à l’accord signé en 2015 n’est pas une réaction épidermique à un quelconque acte prétendument "inamical" d’Alger mais a bien été préparée depuis au moins deux ans.
Durant cette période, les autorités de transition maliennes ont commencé par ne plus répondre aux invitations de l'Algérie, en sa qualité de chef de file de la médiation internationale, ni à participer aux rencontres pour discuter de la mise en œuvre dudit accord.
Bamako a ensuite commencé à mettre en doute la sincérité de la médiation internationale et de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), tout en s’engageant dans une démarche d’acquisition démesurée de nouvelles technologies militaires.
Dans ce cheminement, l’expulsion de la MINUSMA, qui constituait une entrave pour le recours à la solution militaire contre notamment la Coordination du mouvement Azawad dans le nord du pays, a été l’étape la plus significative.
L'Algérie "a un devoir d'information envers le peuple malien frère. Ce dernier sait que l'Algérie n'a jamais failli à travailler à la mise en œuvre de l'Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d'Alger, avec sincérité, bonne foi et solidarité indéfectible envers le Mali frère", avait indiqué vendredi le ministère des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l'étranger dans un communiqué.
Le peuple malien "doit aussi savoir et doit se convaincre que la longue liste des raisons invoquées à l'appui de la dénonciation de l'accord ne correspond absolument ni de près ni de loin à la vérité ou à la réalité", relève le communiqué.
Bamako ne veut pas tirer les leçons du passé
Depuis son indépendance de la colonisation française en 1960, le Mali a connu cinq coups d’Etat. A chaque renversement de régime, les nouvelles autorités accusent leurs prédécesseurs de faiblesse et croient pouvoir résoudre le conflit avec les mouvements du Nord du pays par la force des armes. Systématiquement après, elles rompent les accords de paix chapeautés par l’Algérie.
Puis au final, face à l’impossible résolution de cette crise par la voie militaire, au bout de deux à trois ans, les gouvernements maliens successifs reviennent vers l’Algérie pour jouer le rôle de pompier. Résultat : quatre accords de paix au Mali initiés par l’Algérie sur demande de la partie malienne depuis le premier coup d’Etat en 1968.
Mais si le cheminement des actions des différents auteurs des changements anticonstitutionnels au Mali est quasi similaire, pour se maintenir au pouvoir, il est à noter que la conjoncture régionale est beaucoup plus complexe qu’elle ne l’était avant.
Les autorités de transition maliennes, qui tentent de se créer une légitimité en utilisant la notion de néo-souverainisme et en exacerbant le sentiment nationaliste, décrétant "l’union sacrée", mesurent-elles les risques de leurs actes ? Ont-elles les capacités de faire face à la situation sécuritaire détériorée au nord du pays mais aussi aux groupes terroristes qui ont, selon un récent rapport de l’ONU publié en juillet dernier, doublé l’espace de leur présence dans la région du Sahel en une année seulement ? Sans oublier l’inquiétante prolifération du commerce d’armement lourd dans la région...
Ce tableau noir, qui dessine la situation dans la région du Sahel, s'est assombri encore plus à l’ère de la polarisation internationale et des luttes d’influence.
L’Algérie partage plus que les 1.300 km de frontières avec le Mali. C'est pour cela qu'Alger engagera tous les moyens diplomatiques et utilisera tous ses leviers et canaux disponibles pour éviter le pire au peuple malien et à ceux de la région, d’autant que le monde ne peut et ne veut pas d’un nouveau conflit dans une scène internationale déjà très préoccupée par les guerres en cours.
Ainsi donc, pour se maintenir au pouvoir, les autorités de transition maliennes engagent le Sahel dans une crise sans précédent.
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