La confusion règne au Gabon ce mercredi 30 août où un coup de force est en cours. Selon les informations de RFI, vers 1h du matin, une caméra est allée au Centre gabonais des élections (CGE), l'institution qui organise le scrutin, pour enregistrer les résultats finaux lus par son président Michel Stéphane Bonda. Quelques heures plus tard, ils sont lus sur Gabon Première, la télévision nationale. Mais dès la fin de la lecture, les premiers coups de feu sont entendus. Les résultats sont ensuite donnés sur Gabon 24, la chaîne dont les studios se trouvent dans le palais présidentiel.
« Nous mettons fin au régime en place »
Au moment où les chiffres étaient égrenés, juste avant 5h du matin, la diffusion est coupée pendant quelques minutes. Une douzaine de militaires apparaissent ensuite à l'écran. « Nous mettons fin au régime en place », déclare l'un d'eux en lisant un communiqué proclamant l'annulation des élections et la dissolution des institutions.
Dans le groupe, des bérets rouges, des gendarmes, des bérets verts de la garde républicaine et une personne en civil. Celui qui lit est un béret noir, souvent porté par les soldats des régiments blindés. Il dit s'exprimer au nom d'un « Comité de transition et de restauration des institutions ». Après avoir constaté « une gouvernance irresponsable, imprévisible qui se traduit par une dégradation continue de la cohésion sociale risquant de conduire le pays au chaos [...] nous avons décidé de défendre la paix en mettant fin au régime en place », poursuit-il. « À cet effet, les élections générales du 26 août 2023 ainsi que les résultats tronqués sont annulés. »
Fermeture des frontières
« Toutes les institutions de la république sont dissoutes, le gouvernement, le Sénat, l'Assemblée nationale, la Cour constitutionnelle [...]. Nous appelons la population au calme et à la sérénité et nous réaffirmons notre attachement au respect des engagements du Gabon à l'égard de la communauté internationale », a-t-il poursuivi, proclamant aussi la fermeture des frontières du pays « jusqu'à nouvel ordre ».
L'autorité nationale en charge du scrutin venait juste de déclarer le président Ali Bongo Ondimba, au pouvoir depuis quatorze ans, vainqueur de ces élections à un tour avec 64,27% des suffrages exprimés. Son principal rival Albert Ondo Ossa n'a recueilli que 30,77% des voix. Il avait dénoncé des « fraudes orchestrées par le camp Bongo » deux heures avant la clôture du scrutin samedi.
internet rétabli
À Libreville, la situation semblait calme en début de matinée. L'heure du couvre-feu est passée, des boutiques sont toujours fermées mais il n'y a pas de violences selon plusieurs sources sur place.
Des véhicules militaires circulent dans les rues sans qu'on sache s'il s'agit de putschistes ou de loyalistes. Et à leur passage, on constate des manifestations de joie, tandis que les soldats, eux, saluent de la main.
Dans certains quartiers, des groupes de gens se forment pour discuter des événements de la nuit. Et se connecter aussi sur Internet. Car le réseau, coupé depuis le 26 août en fin de journée, est en train d'être rétabli.
Joint par RFI un peu plus tôt, un habitant raconte avoir entendu des tirs : « Ils lisaient tout le processus électoral, comme le nombre de votants. Ali Bongo a été déclaré président. Après, ça a un peu commencé à tirer. Je suis dans un endroit où on entend tout. On a entendu des tirs de kalachnikovs et des coups de flashballs. Je pense que c’est pour faire peur aussi aux gens pour qu’ils ne sortent pas, et des bombes lacrymogènes dans certains quartiers. C’est un peu angoissant. On s’était déjà tous préparé. Beaucoup d’entre nous avaient déjà fait des courses de ravitaillement. Ce qui nous libère un peu, c’est que depuis deux jours, on peut appeler l’extérieur. Mais il y a deux jours, on ne le pouvait pas. »
Un autre résident de Libreville ajoute : « Quand je me suis levé, on a mis la chaîne de télé nationale. Le président du Centre gabonais des élections proclamait les résultats. Juste quelques minutes après avoir annoncé Ali Bongo vainqueur, on a commencé à entendre des coups de feu dans mon quartier. À quelques mètres de mon quartier, l’armée est basée. Les tirs ont duré une dizaine de minutes. C’étaient vraiment des armes lourdes. On a l’habitude d’entendre des petits coups de feu. […] Je m’interrogeais : Qu’est-ce qu’il se passe ? Pourquoi l’armée est-elle en train de tirer ? À ce moment-là, je pensais que la population était en train de manifester contre les résultats qui étaient proclamés. C’est la première pensée que j’ai eue. »
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