Jusqu'à présent les parties civiles s'étaient tournées vers la justice pénale et la dernière affaire qui mettait en cause les militaires de l'opération Turquoise dans le massacre de Bisesero avait abouti à un non-lieu. Cette fois, c'est l'État français qui est visé pour ses manquements supposés avant, pendant et après le génocide des tutsis, qui a fait près de 800 000 victimes.
Dans cette requête devant le tribunal administratif, les services de l'État français sont visés en tant que système, dans un certain nombre de faits que les parties civiles considèrent comme entachées d'illégalités, propres à constituer, selon elles, des « fautes d'appréciation » et des « fautes lourdes de service ». Le fait, par exemple, que la France n'ait pas dénoncé l'accord d'assistance militaire avec le pouvoir hutu lorsqu'il est devenu génocidaire. Des fautes qui, selon Philippe Raphaël, le représentant des requérants, ont permis le massacre de Bisesero.
« Un condensé de toute l’intervention française »
« Bisesero, dit-il, c’est un condensé de toute l’intervention française. Manifestement, au plus haut niveau de l’état-major, on a considéré, qu’au fond, le génocide était secondaire, comparé à une lecture qui est une lecture du type "c’est un conflit entre le Rwanda et l’Ouganda via le FPR, le Front patriotique rwandais, qui ne serait que le supplétif du pouvoir ougandais". Et ça, c’est constitutif d’une erreur manifeste d’appréciation. Et cette erreur manifeste d’appréciation est séminale parce qu’elle va induire des fautes de service lourdes, continues et systématiques. »
Le tribunal administratif doit recevoir les mémoires en défense de la partie adverse, à savoir, le Secrétariat général du gouvernement. Malgré l'épaisseur des dossiers, les parties civiles espèrent plus de diligence du juge administratif que du juge judiciaire. Et sont prêtes à aller jusqu'au Conseil d'État.
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