L'ONG Amnesty International s’est penchée sur le traitement judiciaire des crimes commis ces dernières années contre les civils maliens, notamment dans le Centre, où les violences contre les civils n’ont cessé d’augmenter depuis 2018. *
Ogossagou, mars 2019 puis février 2020 : près de 200 morts. Sobane Da, juin 2019 : 35 morts. Ces deux massacres mettant en cause des groupes d’auto-défense communautaires, dogon et peul, ont profondément marqué les esprits au Mali.
Mais les enquêtes ont « peu avancé ou sont au point mort », déplore Amnesty International dans un rapport de 70 pages publié ce mercredi 13 avril et consacré aux crimes commis contre les civils maliens, que ce soit par les groupes jihadistes, les groupes armés communautaires d’auto-défense ou l’armée malienne. L'ONG rappelle que les victimes, dans ces deux cas et dans beaucoup d’autres, « continuent de réclamer justice. »
L’absence de protection constitue l'une des principales difficultés. Certaines victimes hésitent à témoigner devant le risque de représailles, de la part des groupes jihadistes, des groupes d’auto-défense communautaires ou même de l’armée malienne. Le contexte sécuritaire général complique évidemment les enquêtes de terrain.
Cadre législatif défaillant
Amnesty pointe également un manque de volonté politique ainsi qu’un cadre législatif défaillant. Exemple : la loi d’amnistie votée en 2015 « dans le sillage de l’accord de paix », dont les ambiguïtés ne permettent pas d’exclure certains crimes graves. Ou encore le fait que, malgré l’existence d’un pôle judiciaire spécialisé, ce soit systématiquement la justice militaire qui enquête sur les allégations d’exactions de l’armée malienne sur des civils. C’est d’ailleurs le cas actuellement pour l’opération menée fin mars à Moura.
Amnesty International dénonce enfin les violations des droits des accusés dans les affaires dites « terroristes », par la Sécurité d’État, les services maliens de renseignements, avec notamment des détentions extrajudiciaires et des actes de torture.
Ousmane Diallo est chercheur au bureau ouest-africain d’Amnesty International, basé à Dakar. Il est l’un des coauteurs de ce rapport qui analyse la réponse judiciaire aux crimes liés au conflit dans le centre du Mali.
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