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Economie

Investissements en Côte d'Ivoire : Ce que révèlent les chiffres publiés par le Cepici

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Le Centre de promotion des investissements en Côte d'Ivoire a rendu publics, mardi 10 juillet 2018, les chiffres officiels sur les investissements privés réalisés en Côte d'Ivoire. Ce sur la période 2017 et aussi au cours des six premiers mois de l'année 2018. Si ces chiffres, dans leur ensemble, affichent une constante augmentation comparativement aux années précédentes, ils ne traduisent pas cependant, nécessairement, les attentes du gouvernement en termes de retombées mesurables. On aurait dit qu'il y a un léger décalage entre les besoins de la Côte d'Ivoire et les propositions des ''partenaires-investisseurs''.

Priorités nationales. En effet, les priorités du gouvernement sont connues de tous, puisqu'énumérées dans le Plan national de développement 2016 – 2020, baptisé « Pnd de l'émergence ». Dans ce document stratégique, le président de la République, Alassane Ouattara, souligne que « le Pnd 2016 – 2020, qui tire les leçons de la mise en œuvre du Pnd 2012 – 2015, a pour ambition de réaliser l’émergence de la Côte d’Ivoire à l’horizon 2020 avec une base industrielle solide ». Il ajoute que la stratégie de transformation structurelle de l’économie s'appuiera sur « la compétitivité de notre économie, la transformation de nos produits de base et d’exportation ». Puis de spécifier les choses en ces termes : « ainsi, le Pnd 2016 – 2020 mettra l’accent sur : (i) l’amélioration du taux de transformation des matières premières agricoles ; et (ii) la diversification de l’appareil productif industriel avec la promotion d'une industrie manufacturière ».

Ces propos du chef de l’État présentent nettement les attentes du gouvernement ivoirien et, partant, les aspirations du peuple de Côte d'Ivoire, à savoir, l'industrialisation du pays, dans sa marche vers « l'émergence ». C'est également cette vision que le Cepici, dans sa mission de promouvoir auprès des investisseurs privés étrangers les opportunités d'affaires en Côte d'Ivoire, partage avec ces derniers lorsqu'ils sont présents en terre ivoirienne, ou lorsque c'est lui [le Cepici] qui se déplace à l'extérieur du pays.

Éventuellement, l'on s'attend à voir, conformément aux priorités énumérées par le chef de l’État, le secteur des industries dans son ensemble, y compris ses sous-secteurs, être sollicité par les potentiels investisseurs que le Cepici n'a de cesse de draguer. Ce à l'occasion des nombreuses missions de prospection menées à Abidjan (130 délégations reçues de janvier à juin 2017 et 147 sur la même période en 2018) et des rencontres à l'extérieur (8 missions de janvier à juin 2017 et 14 sur la même période en 2018).

Décalage. L'analyse sectorielle des investisseurs rencontrés en Côte d'Ivoire et à l'extérieur laisse entrevoir une volonté de ces derniers d'orienter leurs investissements dans le secteur des industries (au moins 20 % d'intentions d'investissements). « On constate une hausse générale de l'intérêt pour les secteurs de l'industrie avec un focus sur les sous-secteurs suivants : agro-alimentaire, cimenterie, Btp et services », a commenté Essis Emmanuel, qui présentait, en tant que directeur général du Cepici, le bilan des activités de l’institution. Mais, entre l'intention et les actes, parfois le fossé est très grand. De fait, alors qu'on note un accroissement du nombre de sociétés créées année après année dans le pays, le secteur des industries semble ne pas vraiment intéresser les hommes d'affaires qui se bousculent aux portes de la Côte d'Ivoire. Le Cepici annonce avoir enregistré la création de 6 267 sociétés sur la période allant de janvier à juin 2017. Ce chiffre s'est accru de 14 % sur la période considérée, mais en 2018, cette fois. Soit 7 423 sociétés, démontrant ainsi que « la dynamique entrepreneuriale est maintenue ».

Mais, quand on observe le tableau de répartition sectorielle des entreprises créées, on se rend compte que le secteur des industries ne représente que 1 % dans ce nombre impressionnant de nouvelles sociétés. Dans le même temps, alors que les secteurs des services, du commerce et des Btp enregistraient au titre des intentions d'investissements, respectivement 9 %, 5 % et 10 %, ceux-ci ont pris la tête du classement quand il s'est agi de passer à la phase de la création d'entreprises. 47 % de ces entreprises créées évoluent dans le secteur des services, quand 29 % se partagent le commerce et 13 % dans les Btp.

Tout à Abidjan. Autres chiffres avancés par le Centre de promotion des investissements, et qui s'y attarde un peu, c'est le nombre global de sociétés, d'emplois générés et le niveau d'investissements qui ont été captés sur la période 2015 – 2017. Les données sont impressionnantes : 33 500 sociétés créées pour un investissement de 1 808 milliards de Fcfa, avec pour effet, 111 000 emplois générés. Le hic dans l'affaire, c'est qu'alors que le gouvernement parle de développement inclusif, la plupart des investissements, donc des emplois créés, ne sont réalisés qu'à Abidjan et, dans une moindre mesure, dans quelques grandes villes de l'intérieur du pays.

A preuve, sur un volume d'investissements de 351 milliards de Fcfa agréés au guichet unique du Cepici sur la période de janvier à juin 2018, seules quelque trois régions, en dehors du district autonome d'Abidjan, sont susceptibles de bénéficier de plus de 10 milliards de Fcfa de ce volume d'investissements (Conf. les chiffres du Cepici sur la dynamique territoriale). Notamment le Bélier, le Sud-Comoé et la Marahoué. Pour des régions comme San Pedro, le Haut-Sassandra, le Tonpki, le Kabadougou, l'Iffou, la Bagoué, la part des 351 milliards de Fcfa qui y sera affectée varie entre 1 et 10 milliards de Fcfa. Et moins d'un milliard pourra toucher quelque huit autres régions. Cela sur la trentaine de régions dont dispose la Côte d'Ivoire. Le reste, évidemment, « pas d'investissement », lit-on sur la légende.

En définitive, c'est Abidjan seule qui se « développe », qui concentre le gros des « millions d'emplois » promis par le président Ouattara. Or, la Côte d'Ivoire, c'est aussi Bouna, Madinani, Zaïbo, Kouassi-Kouassikro, Lopou, etc.

Pourquoi il faut s'accorder sur les priorités

 La Côte d'Ivoire, pour son développement, s'est dotée d'un Plan national. Ce document stratégique, en effet, retrace point par point les actions, projets et investissements que ceux-ci nécessitent pour l'atteinte des objectifs qui y sont définis. C'est vrai que le pays a ses besoins et ses priorités qui ne sont pas forcément ceux des apporteurs d'affaires. C'est aussi vrai qu'on ne peut pas contraindre un opérateur économique à investir dans un projet alors qu'il ne le souhaite pas. Mais en toute responsabilité, il est du devoir de la Côte d'Ivoire de définir la trajectoire de son développement et de faire en sorte que tout le monde converge dans ce sens. Autant les membres du gouvernement travaillent suivant la « vision de l'émergence », autant ces derniers doivent être en mesure d'y faire adhérer les investisseurs privés étrangers qui veulent faire des affaires dans le pays. Mais cela ne peut se faire que dans le cadre d'un dialogue constructif. Ce ne doit plus être une affaire de « combien je gagne si je te donne ce marché ? », mais plutôt « voici nos priorités et les facilités que le gouvernement est prêt à vous accorder ». L'idée, en définitive, sera de mettre sur la table, d'une part, les priorités du gouvernement et promouvoir, d'autre part, les mécanismes d'incitation. Parce qu'en fin de compte, à quoi servira-t-il de déclarer à toutes les tribunes que « la Côte d'Ivoire ambitionne d'être un pays industrialisé » si on n'est pas capable de mécaniser notre agriculture, de transformer nos matières premières agricoles, etc.

A titre illustratif, quand on décide de ne voir circuler sur son territoire que les véhicules non polluants, il faut aussi songer à installer des unités de montage automobile. Ceci pour dire qu'il faut passer aux actions et tourner le dos, un tant soit peu, aux « discours chiffrés ».

 
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