L’ancien président de la République a été déclaré coupable
de corruption et trafic d’influence. Il va faire appel de cette condamnation.
Il est devenu, lundi 1er mars, le deuxième ancien président
de la République condamné sous la Ve République. Nicolas Sarkozy a été condamné
à trois ans de prison, dont un ferme, lundi 1er mars, dans l’affaire dite des «
écoutes ».
L’ancien chef de l’Etat a été déclaré coupable de corruption
et trafic d’influence. La décision a été lue dans un très grand silence au
tribunal correctionnel de Paris, que Nicolas Sarkozy a par la suite quitté sans
faire aucune déclaration.
Son avocate a, par la suite, annoncé qu’il ferait appel de
cette condamnation. Après ce « jugement extrêmement sévère » et « totalement
infondé et injustifié », M. Sarkozy « est calme mais déterminé à poursuivre la
démonstration de son innocence », a assuré Me Jacqueline Laffont. Le pourvoi en
appel suspend l’exécution de la peine, puisque le tribunal n’a pas demandé son
exécution provisoire.
Les faits remontent à 2014. M. Sarkozy était suspecté
d’avoir tenté d’obtenir d’un magistrat à la Cour de cassation, Gilbert Azibert,
des informations confidentielles le concernant, voire de faire annuler la
saisie de ses agendas présidentiels après avoir obtenu un non-lieu dans
l’affaire Bettencourt. M. Azibert, avocat général dans une chambre civile,
n’intervenait pas directement dans ce dossier mais il aurait joué de ses
relations. En échange, M. Sarkozy aurait promis d’intervenir en faveur du
magistrat pour qu’il obtienne un poste de prestige à Monaco. L’accusation se
fondait sur des conversations interceptées par la justice entre l’ancien
président et son avocat sur une ligne officieuse – deux téléphones prépayés
achetés sous le nom de « Paul Bismuth ».
Le tribunal correctionnel a estimé lundi qu’un « pacte de
corruption » avait été conclu entre l’ancien président de la République,
aujourd’hui âgé de 66 ans, son avocat Me Thierry Herzog et l’ancien haut
magistrat Gilbert Azibert. « La preuve du pacte de corruption ressort
d’un faisceau d’indices graves, précis et concordants résultant des liens très
étroits d’amitié noués entre les protagonistes », a relevé le tribunal.
Nicolas Sarkozy, qui a été « garant de l’indépendance de la
justice, s’est servi de son statut d’ancien président pour gratifier un
magistrat ayant servi son intérêt personnel », a déclaré la présidente
de la 32e chambre correctionnelle de Paris, Christine Mée. Il devient le
deuxième ancien président condamné sous la Ve République, après Jacques Chirac,
en 2011, dans l’affaire des emplois fictifs de la Mairie de Paris.
Thierry Herzog et Gilbert Azibert également condamnés
Le tribunal a aussi reconnu M. Herzog coupable de corruption
active et de violation du secret professionnel et l’a condamné à trois ans de
prison, dont deux avec sursis, assortis de cinq ans d’interdiction d’exercer la
profession d’avocat. Pour le tribunal, l’avocat de l’ancien président « s’est
placé hors du champ de la défense » et « le lien personnel fraternel qu’il a
noué avec M. Sarkozy a obscurci, par manque de distance, son discernement
professionnel d’avocat ». Thierry Herzog a d’ores et déjà fait appel de sa
condamnation.
Gilbert Azibert a, pour sa part, été déclaré coupable de
corruption passive et de recel de violation du secret professionnel. Il a lui
aussi été condamné à trois ans d’emprisonnement, dont deux avec sursis. Selon
le tribunal, ce dernier « s’est non seulement affranchi de façon
persistante de ses obligations déontologiques, mais il a aussi trahi la
confiance de ses collègues de la Cour de cassation ».
« Les délits ont porté gravement
atteinte à la confiance publique en instillant dans l’opinion publique l’idée
selon laquelle les procédures devant la Cour de cassation ne procèdent pas
toujours d’un débat contradictoire devant des magistrats indépendants mais
peuvent faire l’objet d’arrangements occultes destinés à satisfaire des intérêts
privés », peut-on lire dans le jugement.
Le tribunal est resté en deçà des réquisitions du Parquet
national financier (PNF), qui avait demandé le 8 décembre 2020 les mêmes peines
de quatre ans d’emprisonnement dont deux ferme à l’encontre des trois prévenus.
Le PNF avait estimé que l’image présidentielle avait été « abîmée » par cette
affaire aux « effets dévastateurs ».
Durant les trois semaines du procès dit « des écoutes », qui
s’est tenu à la fin de novembre et au début de décembre, les avocats des trois
prévenus, Nicolas Sarkozy, son avocat de l’époque, Thierry Herzog, et Gilbert
Azibert avaient dénoncé des « fantasmes », un « procès d’intention » fondé sur
des écoutes « illégales » et ont plaidé la relaxe face à un « désert de preuve
». La plus marquante étant, selon leurs avocats, que Nicolas Sarkozy n’a pas eu
gain de cause devant la Cour de cassation, et que Gilbert Azibert n’a pas non
plus obtenu la promotion qu’il espérait.
Cette première condamnation pour M. Sarkozy intervient alors
qu’il doit de nouveau faire face à des juges, dès le 17 mars, pour le procès de
l’affaire Bygmalion, portant sur les frais de sa campagne présidentielle de
2012. Retiré de la politique depuis 2016 mais toujours très populaire à droite,
un an avant le prochain scrutin présidentiel, Nicolas Sarkozy est sous forte
pression judiciaire.
Il est mis en cause dans plusieurs dossiers, dont celui
portant sur les soupçons de financement libyen de sa campagne victorieuse de
2007. C’est dans le cadre de cette dernière affaire qu’il avait été placé sur
écoute en 2013 et que les juges avaient découvert qu’il utilisait une ligne
téléphonique secrète, ouverte sous le pseudonyme de « Paul Bismuth », pour
communiquer avec son avocat Thierry Herzog.
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