Une semaine avant son exécution, l'artiste folklorique recevait les talibans dans la ferme familiale, autour d'une tasse de thé. Cet assassinat aurait eu lieu à titre de prévention.
Les montagnes de la vallée afghane d'Andarab pleurent Fawad Andarabi, chanteur folklorique. Réputé pour sa pratique du ghaychak, un luth à court chevalet, il était venu chanter dans cette région, quelques jours avant d'être tué par les talibans. «Notre magnifique vallée, terre de nos ancêtres» célèbre Fawad sur la vidéo ci-après, accompagné de son instrument fétiche et d'autres musiciens.
Sur Twitter, Masoud Andarabi, ancien ministre de l'Intérieur afghan, rend hommage au défunt avant de condamner les actes des talibans, installés à la tête du pays depuis le 15 août. « La brutalité des talibans continue à Andarab. Aujourd'hui, ils ont brutalement tué le chanteur folklorique Fawad Andarabi, qui apportait simplement de la joie à cette vallée et à ses habitants», annonce-t-il.
La raison de son assassinat ? Sa musique ne serait pas «islamique», selon les dires de Zabihullah Mujahid, porte-parole des talibans, au New York Times . Fawad Andarabi a donc été tué le 27 août dernier d'une balle en pleine tête. Son fils précise à l'agence Associated Press que ce drame surgit seulement une semaine après avoir reçu la visite des talibans pour le thé dans la ferme familiale. Un acte barbare à titre de prévention.
La musique menacée
Une sensation de déjà-vu. Dès leur première prise de pouvoir entre 1996 et 2001, les talibans affichaient déjà leur intention d'éradiquer la musique du pays. «Lors du précédent régime taliban, la place de la musique et des musiciens, c'était la tombe, se désole Daud Khan Sadozai, musicien originaire de Kaboul, au micro de France Musique . Ils ont détruit systématiquement les instruments, les cassettes et les télévisions, tout ce qui pouvait servir de support à la musique n'autorisant que les chansons de propagandes ou religieuses». Cet instrumentiste, aujourd'hui domicilié en Allemagne, a réussi à échapper aux talibans en 1996.
Afin d'éviter la réécriture de ce sinistre scénario, le docteur Ahmad Sarmast confiait à la BBC que plusieurs étudiants avaient rendu leurs instruments au conservatoire ou les avaient même cachés depuis le retour des talibans. «Les étudiants ont peur et sont inquiets. Ils comprennent clairement que s'ils retournent étudier la musique, ils pourraient en subir les conséquences et être punis pour ce qu'ils ont fait ».
Les talibans ne laissent pas le choix aux musiciens comme ils restreignent le droit des femmes. Leur porte-parole s'engageait pourtant «à [les] laisser travailler dans le respect des principes de l'islam», engagement présenté durant la première conférence de presse depuis la reconquête de Kaboul. Promesse en l'air : à titre d'exemple, à ce jour, sur 700 femmes journalistes dans la capitale afghane, moins de 100 sont encore en activité selon Reporters sans frontières .
0 Commentaires
Participer à la Discussion
Commentez cet article