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Le Sud du Mali est-il menacé ?

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Attaques et attentats ne sont plus cantonnés au Nord du Mali. Le sud du pays devient également la cible des jihadistes. Les regards se tournent vers Hamadoun Koufa, un proche du groupe Ansar Eddine.

Toujours plus au sud. Depuis le 5 janvier etl’attaque jihadiste qui a coûté la vie à onze militaires maliens à Nampala, dans la région de Mopti, la menace terroriste, jusqu’à présent « cantonnée » au Nord, est devenue une réalité sur l’ensemble du territoire malien. Après Nampala, un attentat a pour la première fois frappé Bamako, le 7 mars, lorsqu’un homme armé d’une kalachnikov a ouvert le feu et fait cinq morts dans un restaurant fréquenté par des expatriés occidentaux. Début juin, Nara, petite ville proche de la Mauritanie, a été visée. Bilan : trois soldats maliens tués. Et plus récemment encore, les 10 et 28 juin, ce fut au tour des localités de Misséni et Fakola, près de la frontière ivoirienne (les assaillants ont exécuté un gendarme et brièvement pris possession de bâtiments administratifs).

Toutes ces attaques, à l’exception de celle de Bamako, ont été revendiquées par Ansar Eddine dans un communiqué daté du 3 juillet. Le groupe d’Iyad Ag Ghaly affirme qu’elles ont été menées par les katibas Macina et Khalid Ben Walid. De quoi conforter les responsables sécuritaires maliens, qui suspectent fortement Hamadoun Koufa et sa Force de libération du Macina d’être derrière la multiplication des attaques meurtrières dans le centre et le sud du pays ces derniers mois. « Ce ne sont pas des initiatives individuelles, mais des actions organisées par les réseaux de Koufa, qui est lui-même intimement lié à Iyad », croit savoir un haut responsable du ministère malien de la Défense.

Si le sort de Hamadoun Koufa reste incertain, certains le disent mort, d’autres toujours en vie, une chose est sûre : c’est – ou c’était – un proche du chef d’Ansar Eddine, lui aussi toujours introuvable (lire encadré). Après des études coraniques dans la région de Nampala, durant lesquelles ce Peul se fait repérer en enregistrant des prêches enflammés en pulaar, Koufa intègre dans les années 2000 la Dawa, une secte fondamentaliste d’origine pakistanaise implantée au Mali. C’est là qu’il se radicalise et qu’il aurait noué des liens avec Iyad Ag Ghaly, qu’il a ensuite rejoint dans le nord du pays en 2012. Les deux hommes auraient participé ensemble à l’assaut sur Konna début janvier 2013, lors de l’offensive jihadiste vers le sud du Mali. Leur tentative d’expansion fondamentaliste sera finalement stoppée par les hélicoptères français et le déclenchement de l’opération Serval.

Fort de ses talents d’orateur et de son implantation dans la région du Macina, Hamadoun Koufa s’est progressivement constitué un réseau de plusieurs dizaines de fidèles, regroupés au sein de la Force de libération du Macina, un groupe dont l’objectif serait de rétablir l’empire peul du Macina, un régime théocratique de la fin du XIXe siècle. Selon des témoins interrogés par Human Rights Watch (HRW), la majorité de ses membres serait des Peuls ayant auparavant combattu sous la bannière du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) ou d’Ansar Eddine.

Malgré la revendication d’Ansar Eddine et plusieurs pistes menant au réseau de Koufa dans les attaques de Nara, Misséni ou encore Fakola, l’identité, les motivations et le mode opératoire des assaillants sont encore mal connus. Selon une source sécuritaire malienne, ces assauts ont été menés « par des Maliens du Sud radicalisés et instrumentalisés, parlant les dialectes locaux », et non par des « gens du Nord ». Des enquêtes sont actuellement en cours, notamment pour savoir s’il s’agit d’un réseau organisé ou de cellules indépendantes. « Dans ces zones, les populations sont complètement opposées à la pratique d’un islam radical, poursuit notre source. Il y a donc eu beaucoup de dénonciations et d’interpellations. » Cinq personnes ont ainsi été arrêtées dans le secteur de Sikasso après les événements de Misséni.

Hors de leur champ d’action privilégié que constitue le nord du pays, les responsables français et onusiens, qui ne disposent pas de troupes dans le Sud, ne semblent pas en savoir beaucoup plus sur ces attaques inédites. « Il y a sûrement un mélange de terrorisme et de banditisme, lâche un cadre du ministère français de la Défense. Mais il est encore un peu tôt pour savoir si nous sommes face à un problème structurel ou non. » La thèse d’orpailleurs ou de brigands locaux, agissant sous l’étendard noir des jihadistes pour détourner l’attention, n’est pas non plus à exclure.

Face à cette menace naissante et mal identifiée, les forces armées maliennes ont renforcé et réorganisé leur dispositif sécuritaire dans le Sud. Un défi de plus pour une armée en reconstruction, au moment même où l’accord de paix, signé le 20 juin par les rebelles de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), doit progressivement être appliqué dans le Nord. De leur côté, les Ivoiriens, préoccupés par ces attaques répétées à seulement quelques kilomètres de leur frontière, ont eux aussi décidé d’envoyer des renforts.

Activement recherché par les services de renseignements, le chef d’Ansar Eddine reste introuvable. Très mobile et prudent, Iyad Ag Ghaly se déplacerait en permanence entre son bastion de l’Adrar des Ifoghas, au nord de Kidal, et le sud de la Libye. Sa femme, elle, se trouverait à Tinzaouaten, près de la frontière avec l’Algérie. Enchaînant les frappes ciblées contre les chefs jihadistes de la région, les responsables français cherchent toujours à « neutraliser » Iyad Ag Ghaly, dont plusieurs proches ont déjà été éliminés (dont Abdelkrim el-Targui, en mai, et Mohamed Ali Ag Wadoussène, le 5 juillet). « Si on peut le taper, on le tapera », affirme-t-on à l’Élysée, sans cacher les difficultés à localiser cette HVT (high-value target), « cible de haute valeur » dans le jargon militaire.

 

 

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