Elena* (le prénom a été modifié) se trouve à Zaporojie, cette ville ukrainienne où affluent des milliers de réfugiés fuyant le sud et l'est du pays, ravagés par les combats. La jeune femme blonde a d'ailleurs quitté sa maison de la région de Kherson, dès le premier jour de l'offensive russe. Elle attend un car qui l'emmènera à Vinnytsia, plus à l'ouest, où se trouvent ses quatre enfants.
Sans montrer son visage et avec la voix souvent submergée par l'émotion, Elena a décidé de témoigner. Elle raconte avoir été violée par deux soldats russes pendant treize heures, après avoir été désignée par des habitants comme une femme de militaire ukrainien. Son mari combat depuis deux ans les séparatistes prorusses dans la région du Donbass.
"C'est une banderovka"
"Vers 15 heures, je suis allée dans une épicerie. Pendant que je faisais la queue, des militaires russes sont entrés et ont commencé à discuter avec des clients", raconte-t-elle. Soudain, la jeune Ukrainienne voit qu'on la pointe du doigt en disant "c'est une banderovka", référence au dirigeant ultranationaliste ukrainien Stepan Bandera, qui collabora avec l'Allemagne nazie contre l'Union soviétique.
"C'est à cause de gens comme elle que cette guerre a éclaté, c'est la femme d'un militaire", entend-t-elle alors. Elle raconte se presser de retourner vers son logement, mais deux soldats russes la suivent alors.
"J'ai à peine eu le temps de rentrer, les deux soldats russes sont entrés par la porte derrière moi. Je n'ai pas eu le temps de prendre mon téléphone pour appeler à l'aide, ni de faire quoi que ce soit", poursuit Elena.
Violée pendant treize heures
"Sans un mot, ils m'ont poussée sur le lit, m'ont écrasée avec une mitraillette et déshabillée", lâche la jeune femme en fondant en larmes.
Elena raconte alors que les deux militaires l'ont violée pendant près de treize heures. "Ils ne parlaient presque pas, à part quelquefois pour me traiter de 'banderovka' ou se dire entre eux 'à ton tour'", détaille-t-elle avec émotion. La jeune femme n'en a parlé à personne, pas même à un medecin ou un psychologue, encore moins à sa famille. "Je suis sage-femme, je me suis administrée les premiers soins moi-même", explique-t-elle.
"Je me dégoute. Je ne veux plus vivre", déclare alors la jeune mère.
Le viol comme arme de guerre
"Je suis certaine que l'Ukraine reprendra ces territoires aux soldats russes et que les nôtres se vengeront d'eux", assure Elena pour conclure. Alors que plusieurs organismes de défense des droits humains craignent l'utilisation du viol comme arme de guerre en Ukraine, la collecte de preuve pour obtenir justice plus tard est difficile.
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