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L'ancien directeur de campagne de Donald Trump et très proche conseiller est actuellement soupçonné par les services de renseignement américains d'avoir établi de nombreux contacts troubles avec la Russie. Le parcours de ce consultant en politique est émaillé de relations dangereuses avec des autocrates au passé tumultueux.
La polémique prend de l'ampleur auprès des proches de Donald Trump. Seulement deux jours après la démission de Michael Flynn, ancien conseiller à la sécurité nationale, la présidence de M.Trump est secouée par des nouvelles informations du New-York Times. Le quotidien américain a révélé mardi 14 février au soir que des membres de la campagne présidentielle de Donald Trump et des associés du milliardaire avaient eu plusieurs discussions avec les services secrets russes.
Les identités des proches de Trump mis en cause n'ont pas été révélées par les sources du journal américain, à l'exception de Paul Manafort. D'autres noms pourraient être dévoilés au grand public dans les jours à venir.
Un directeur de campagne démissionnaire
Le 19 août dernier en pleine campagne présidentielle, Donald Trump avait annoncé lui même la démission de son directeur de campagne Paul Manafort dans un communiqué. "Ce matin, Paul Manafort a offert, et j'ai accepté, sa démission de la campagne. Je suis très reconnaissant de son excellent travail pour nous aider à être là où nous sommes aujourd'hui".
Ce départ faisait suite à des révélations du New-York Times qui avait révélé que Paul Manafort s'était retrouvé au centre d'une affaire de corruption en Ukraine. Ancien conseiller de l'ex-président ukrainien Viktor Ianoukovitch renversé en 2014, M.Manafort est soupçonné d'avoir reçu 22 versements entre 2007 et 2012 pour un montant total de 12,7 millions de dollars provenant du parti de M.Ianoukovitch.
Après sa démission, Paul Manafort a été remplacé par la spécialiste des sondages Kellyanne Conway. Celle qui est devenue l'une des principales conseillères de M.Trump à la Maison Blanche s'est récemment fait connaître pour avoir promu les "faits alternatifs" - autrement dit des mensonges - au moment de l'investiture du milliardaire à la Maison Blanche.
Un lobbyiste habitué des campagnes politiques
Paul Manafort est loin d'être un novice en politique américaine. Cet homme né en 1949 dans le Connecticut a été à de multiples reprises dans l'entourage de candidats républicains depuis 40 ans. Ce stratège en politique a travaillé dans les années 70 et 80 pour les campagnes de Gerald Ford (1974-1977) et Ronald Reagan (1981-1984). Il a également accompagné Georges Bush père (1989-1983) en 1988 et Bob Dole en 1996. Cet habitué des cercles républicains aux Etats-Unis a également multiplié les relations et les contrats avec des dirigeants étrangers au passé trouble.
Les liaisons dangereuses de Paul Manafort en Afrique
Le lobbyiste américain a entretenu de nombreuses relations politiques et commerciales avec des dirigeants africains au passé peu reluisant.
En co-fondant son cabinet de lobbying Black, Manafort, Stone and Kelly (BMS & K) en 1982, Paul Manafort a ainsi pu conseiller Mobutu Sese Seko au Zaïre, Jonas Savimbi en Angola, Siad Barre en Somalie, Ibrahim Babangida au Nigeria, Daniel Moi au Kenya, et Teodoro Obiang en Guinée équatoriale.
Au moment de la guerre froide, beaucoup de pays ont cherché à se rapprocher des Etats-Unis avant que le mur de Berlin tombe comme l'a expliqué Riva Levinson, ancienne salariée du cabinet de Manafort interrogée par le Monde Afrique :
"C'était l'époque où Ronald Reagan avait demandé quelques mois auparavant à Gorbatchev d'abattre le mur [de Berlin]. C'était une époque de transition, et beaucoup de pays autour du monde cherchaient à se ranger derrière les Etats-Unis contre les Soviétiques."
A la suite de la mise au grand jour de toute cette clientèle, le cabinet de Paul Manafort avait été surnommé "le lobby des tortionnaires" dans un rapport rédigé par un groupe de journalistes d'investigation américains rassemblés au sein du Center for public Integrity.
Bien que Paul Manafort possède un carnet d'adresses important sur le continent africain, le candidat républicain à l'élection présidentielle de 2008 John McCain avait renoncé après plusieurs hésitations à faire appel à ce "spin doctor" aux relations dangereuses.
Les liens de Paul Manafort avec la France
Outre ses liens avec le continent africain, Paul Manafort également été conseiller de l'ancien Premier ministre Edouard Balladur notamment pour réaliser des sondages en 1995 au moment de la campagne présidentielle. Le nom du consultant est également apparu dans l'affaire Karachi. Le juge Renaud Van Ruymbeke en charge de l'instruction du dossier avait en effet interrogé Paul Manafort sur l'argent qu'il aurait reçu sur des rétrocommissions perçues en marge de contrats d'armement.
L'intermédiaire Ziad Takkiedine a même déclaré sur Médiapart qu'il "avait rémunéré Manafort pour des conseils sur la politique US que je transmettais au roi Fahd (ndlr : ancien roi Arabie saoudite)" précisant que ses "divers divers paiements à Paul Manafort, à sa famille, et à sa société n'ont absolument rien à voir avec la campagne d'Édouard Balladur". Le passif de M.Manafort pourrait encore affaiblir le crédit de l'administration Trump au sein de l'opinion publique américaine.
Avec latribune.fr
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