« La liberté de penser et d’exprimer sa pensée publiquement est fondamentale pour un environnement sociopolitique sain. Car c’est en exposant les problèmes que l’on se donne le plus de chance de les corriger. La meilleure protection contre le risque de tyrannie, c’est la liberté de critiquer les gouvernants ».
Ouvrant en ces termes son discours prononcé à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, Richard K. Bell, ambassadeur des États-Unis en Côte d’Ivoire, a bien voulu attirer l’attention sur certaines conditions nécessaires pour répondre aux exigences qui ont donné corps à cette journée commémorative.
« En acceptant sereinement les critiques, mieux, en les écoutant sérieusement et en y apportant des réponses idoines, les gouvernants affichent à la fois leur confiance en la robustesse des institutions qu’ils dirigent et leur engagement sincère à résoudre les problèmes. Car il y a toujours des problèmes puisque la situation vécue n’est jamais parfaite », a-t-il fait savoir, avant de trancher : « Ceux qui, au contraire, tentent de réduire au silence les voix dissidentes proclament ainsi qu’ils se considèrent fragiles; que malgré leur force souvent brutale, ils ont peur du peuple, peur de la vérité; que leur priorité, c’est leur amour-propre et non pas l’amélioration de la situation. Pensant renforcer leur stabilité, ils la minent eux-mêmes ».
L’État et la liberté de la presse
Le diplomate américain n’a pas manqué d’interpeller sur les principes de l’État de droit: « C’est principalement vis-à-vis de l’État que se situe la liberté de la presse, c’est-à-dire qu’en premier lieu, l’État a le devoir de s’abstenir d’enfreindre la liberté. Les gouvernants sages vont plus loin, et encouragent la liberté de la presse, tout en sachant que cela leur vaudra d’être critiqués. Les gouvernants sages savent que la protection des libertés n’est jamais assurée une fois pour toutes; il faut la sauvegarder tous les jours, et on peut toujours mieux faire. Le Président Biden place au centre de sa politique la démocratie et les droits humains, y compris bien sûr la liberté de la presse.
Les gouvernants sages comprennent qu’il n’en faut pas beaucoup pour que certains journalistes se sentent intimidés et commencent à s’autocensurer. Ce qui est malsain. Quand les journalistes peuvent faire leur travail en toute confiance, ils contribuent à la transparence, ils éclairent des aspects de la réalité, ils combattent ainsi la corruption et défendent les droits humains; ils aident le peuple et les gouvernants à mieux comprendre ce qui se passe et quels sont les enjeux ».
Tout en saluant les progrès réalisés par la Côte d’Ivoire, qui est passée de 101e pays au classement de Reporters Sans Frontières en 2014, au rang de 37e sur 180 pays en 2022, il a également fait savoir l’importance des réseaux sociaux. Pour lui, l’internet et les réseaux sociaux font partie intégrante des modes de communication, qui ont énormément augmenté l’accès aux informations de tout genre. De plus en plus de gens, surtout les jeunes, se renseignent principalement sur internet. Raison pour laquelle il convient que les médias responsables soient présents en ligne.
L’interlocuteur est aussi revenu sur certaines difficultés. « Le revers de la médaille, c’est qu’il est malheureusement plus facile que jamais de propager des informations fausses – souvent délibérément fausses. Les États-Unis sont convaincus que le meilleur moyen de contrer les informations fausses, c’est avec des informations fiables – il faut plus de transparence, pas moins. L’information est un bien public. La liberté de la presse exige la liberté de l’internet. En même temps, il convient que chaque personne de bonne foi fasse un effort pour distinguer entre les sources d’information a priori fiables et celles qui ne le sont pas du tout », relève-t-il.
Pour éviter les mauvaises informations des réseaux sociaux
L’ambassadeur a donné quelques astuces pour contourner les fakenews : « Premièrement, identifier la source. Il y a beaucoup de fausses identités en ligne, y compris un grand nombre de comptes robots. Une seule personne peut manipuler des dizaines, voire des centaines de comptes robots, pour donner l’impression qu’il s’agit d’une tendance importante et donc a priori crédible. Or, les sources d’informations fiables ne sont pas des individus mais des organismes de journalistes professionnels qui s’identifient clairement et assument leurs responsabilités. Les organismes liés à des États qui répriment ceux qui osent les critiquer ne sont a priori pas dignes de foi.
Deuxièmement, se méfier des sources qui attisent la colère, le ressentiment, la peur. Cela attire l’attention, ce qui semble suggérer une certaine crédibilité, mais c’est tout le contraire – c’est fait pour manipuler l’opinion, dans un but destructif. Troisièmement, se rappeler qu’en toute chose, la signification dépend du contexte. Il n’est que trop facile de citer des faits hors contexte, mais cela donne très souvent une impression fausse. Exemple : imaginons que votre équipe de foot joue un match contre son grand rival, et gagne finalement, mais qu’un supporter de l’autre équipe décide de produire une vidéo qui montre uniquement les meilleurs moments de son équipe et les pires erreurs de la vôtre. Tout le contenu de cette vidéo serait authentique, mais l’impression que le spectateur en dégagerait serait complètement fausse.
La signification dépend toujours du contexte », a-t-il dit, avant de rendre hommage à tous les journalistes qui ont sacrifié leur vie ou leur liberté dans l’exercice de leur noble profession. « J’affirme que la contribution des médias au développement du pays dépend du courage, du talent, du professionnalisme des journalistes et de ceux qui les soutiennent. Je les salue. Respectons-les, appuyons-les tout au long de l’année », a-t-il conclu.
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