C’est avec beaucoup de stupéfaction que nous avons écouté le communiqué du porte-parole du gouvernement du mercredi 14 septembre 2016. Il en ressort que le réferendum visant à doter la Côte d’Ivoire d’une nouvelle constitution devrait se tenir dans le courant du mois prochain.
Ce calendrier est au mieux inquiétant, au pire pathétique. En effet, la constitution, plus qu’un simple document contenant des normes, est l’âme d’un Etat, d’une Nation. Elle cristallise les principes, les valeurs d’un Etat et organise la dévolution du pouvoir et le fonctionnement des institutions. La constitution est donc le texte le plus important de l’Etat auquel les autres normes ne sauraient déroger. L’importance de la constitution est telle qu’elle est nécessairement rédigée par le peuple et adopté par lui-même.
Seulement, en Côte d’Ivoire, le régime en place peine déjà à respecter nos textes et la constitution existante. Aujourd’hui, le président se précipite pour faire passer «sa constitution», mais pas celle du peuple qui jusqu’à présent est ignoré dans la procédure.
En clair, jusqu’à ce jour, le texte définitif rédigé par le président de la République et ses experts n’est pas connu par les populations. Aucun débat télévisé contradictoire sur l’opportunité de la nouvelle constitution, ses tenants et ses aboutissants, n’a été organisé. Toutefois, la Rti se fait le relais inlassable des appels à voter «oui» pour un texte encore inconnu. Ceci est symptomatique de la volonté du président pour un passage en force. Il faut d’ailleurs rappeler que M. Ouattara avait déjà manifesté cette volonté d’écarter le peuple du débat public sur la constitution en tentant d’imposer une nouvelle constitution sans referendum. A cet effet, il avait saisi, par son ministre de la Justice, le Conseil constitutionnel pour s’assurer de la faisabilité d’une telle initiative. Stoppé net par le Conseil, il récidive autrement.
L’obstination du président, nonobstant les mises en garde de l’opposition et de la société civile, à poursuivre sa démarche, est dangereuse. La Côte d’Ivoire sort d’une longue crise dans laquelle la constitution a cristallisé l’attention. Sa refonte doit viser à moderniser les institutions et à renforcer la démocratie. «Une bonne constitution ne peut suffire à faire le bonheur d’une nation; une mauvaise peut suffire à faire son malheur» disait Guy Carcassonne.
LIDER exhorte M. Ouattara à ouvrir le débat sur la constitution et à éviter toute précipitation. Nous espérons que nos propositions de passage du régime présidentiel au régime parlementaire seront au cœur du débat, pour aboutir non pas au renforcement du pouvoir du président de la République et de la caste au pouvoir, mais à la limitation de l’Etat, et à l’augmentation des libertés individuelles et des pouvoirs de contrôle de l’exécutif par le peuple.
Arnaud Gohi est le Délégué National LIDER à la justice et à l’état de droit
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