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Politique

Danièle Boni-Claverie, présidente de l’URD : « Ce serait une erreur de croire que seuls les militants du Fpi sont concernés par le retour de Gbagbo »

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Pour Danièle Boni-Claverie, présidente de l’URD, « Ce serait une erreur de croire que seuls les militants du Fpi sont concernés par le retour de Gbagbo »

Présidente de l’Union pour la République et la Démocratie, Madame Danièle Boni-Claverie et son parti militent dans l’opposition ivoirienne. Elle est membre de la plate-forme de l’opposition et est à tous les rendez-vous de la lutte pour la démocratie, la liberté et la paix. A l’occasion de son anniversaire, elle nous a accordé cette interview dans laquelle elle donne son point de vue sur l’actualité politique en Côte d’Ivoire.

Madame la présidente, vous soufflez votre 79ème bougie. Qu’est-ce que cela vous inspire comme sentiment et commentaire ? Vous sentez-vous toujours prête à mener le combat de la démocratie que vous menez depuis des années ?

Si je n’avais pas été une personnalité publique, j’aurais été vexée que vous étaliez mon âge dans les colonnes de votre journal mais je n’ai plus cette pudeur car les jeunes générations sont là pour me rappeler qu’en tant que devancière, on sait exactement à quelle époque j’appartiens. Pour en finir avec mon âge, je dirai que la longévité n’est pas une tare, encore moins « un naufrage ». C’est au contraire une valeur nourrie par l’expérience et dans la chaîne des générations, c’est un maillon important pour que la transmission se fasse sans conflits. On ne doit pas opposer la jeunesse à l’âge. J’ai lu quelque part que « sage est la jeunesse qui s’éclaire du vécu de la vieillesse ». Mais pour tout vous dire, je ne me sens pas du tout vieille parce qu’en fait, l’âge n’est qu’une conjugaison du temps par la grâce de Dieu.

D’aucuns disent qu’être femme en politique, sous nos tropiques, c’est un peu compliqué. Surtout quand elle a votre âge.

Ce sont des stéréotypes où l’âge n’a rien à voir. Entrer en politique pour une femme reste toujours compliqué. Elle est soumise à des contraintes socioculturelles parfois pesantes et notamment à un élément très dissuasif qu’est la violence en politique. Trouvez-vous normal que des femmes manifestent pacifiquement et qu’on leur oppose des chars de l’armée et qu’elles se retrouvent emprisonnées pendant des mois ? Il est évident que cela n’incite pas nos jeunes sœurs à occuper le terrain politique. Cependant, je constate une prise de conscience qui amène les jeunes à vouloir s’engager non pas dans les querelles intestines entre Etats-majors mais à s’impliquer dans la politique pour changer la société et être ainsi au plus près des préoccupations de nos compatriotes. Les femmes de l’URD ont décidé de s’attaquer frontalement aux grossesses en milieu scolaire, aux mutilations génitales en nette augmentation, aux viols trop souvent considérés comme des délits et jugés tels quels alors qu’il s’agit d’un crime. Et la liste est loin d’être close.

Que pouvez-vous conseiller aux femmes politiques et aux jeunes femmes ?

Chacun doit faire son expérience, trébucher et se relever. Faire la politique est un chemin de vie avec ses hauts et ses bas mais c’est en premier, se mettre au service de ses compatriotes parce qu’on a un idéal, que l’on porte en soi une vision de changement, d’amélioration. N’envisager la politique uniquement que sous l’angle d’un profil de carrière, c’est la réduire à ce fameux « gâteau » qui paraît-il, se partage, la main sur le colt ou à un « restaurant » où les plus forts occupent les meilleures places. La classe politique ivoirienne est malade entre autres de son clientélisme, de ses pratiques de courtisanerie et de son manque d’idéologie et la question que sont en droit de nous poser les jeunes est de savoir quel héritage nous leur laissons. Même si l’aspiration à un renouvellement de la classe politique est légitime, évitons de la transformer en un conflit générationnel. Je tiens aussi à souligner que nous sommes le 4ème pays d’émigration vers l’Europe. Quand une jeunesse n’a plus de perspectives malgré les déclarations dithyrambiques des autorités qui nous présentent la Côte d’Ivoire comme un pays de cocagne, cela nous interpelle violemment.

Quelle lecture faites-vous de l’actualité politique nationale depuis la présidentielle d’octobre 2020 ? La Côte d’Ivoire est-elle vraiment sur le chemin de la réconciliation ?

Cela fait des années que ce terme est utilisé à tort et à travers sans qu’on lui ait donné un véritable contenu. Pour le moment, elle balbutie même si nous ne devons pas minimiser les faibles commencements. La décision du retour du Président Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé est une mesure exogène dont se serait bien passé le pouvoir. Cependant, il nous faut saluer la validation de leur retour par le régime Rhdp ainsi que celles de personnalités du FPI qui ont mis fin à leur exil avec l’accord des autorités. La libération de Pulchérie Gbalet et de 200 autres détenus politiques est également à saluer. Ce sont des gestes d’apaisement à prendre en compte pour faire démarrer la réconciliation.

Que faut-il véritablement pour que les Ivoiriens se parlent et s’écoutent à nouveau ?

Le pouvoir avait promis la tenue d’Assises nationales et il serait regrettable que cela tombe aux oubliettes. Pour se retrouver, se réconcilier, toutes les forces vives de notre pays doivent se parler. Si nous voulons créer un climat politique et social apaisé, nous devons nous asseoir, faire un état des lieux de la situation politique et socio-économique, ne pas avoir peur de nous dire des vérités avec la ferme intention d’aboutir à des solutions consensuelles. Pour que la population ait son mot à dire, il pourrait être envisagé des consultations citoyennes comme cela s’est fait au Sénégal. Le bateau Ivoire tangue, l’unité nationale est mise à mal, la cohésion nationale est en lambeaux et la corruption gangrène tous les secteurs d’activité. Seul un « sursaut national » peut nous sauver.

Le retour du Président Laurent Gbagbo est-il la clé de la réconciliation nationale, comme on le dit ?

Oui, le Président Laurent Gbagbo est la clef de voûte de la réconciliation. D’abord, il en a fait la priorité du programme d’actions de son parti et son retour qui ne peut se faire que dans la liesse populaire sera un baromètre des bonnes intentions du régime. Je pense que les autorités de ce pays ne sortiraient pas grandies d’un bras de fer entre elles et la population. En effet, ce serait une erreur de croire que seuls les militants du Fpi sont concernés par ce retour. Tous les Ivoiriens, toutes chapelles politiques confondues, société civile en tête entendent exprimer leur joie de voir un des leurs revenir au bercail après tant de souffrances. Cela ne peut se faire que dans l’exubérance, la ferveur populaire, les chants, les cris de joie et les pas de danse. Alors qui parle de triomphalisme ?
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