Une autre trouvaille, pour le moins inédite, dans sa guerre contre Alassane Ouattara. Un tribunal traditionnel populaire de l’une des communautés les plus fortes en Côte d’Ivoire : la chefferie issue du grand centre, devant laquelle il a traduit, hier mercredi 6 mars 2019, son ex-allié, le chef de l’État, Alassane Ouattara.
Pendant de longues heures, Bédié a proprement lynché, verbalement, son ex-allié et tous ceux qui l’accompagnement dans le Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp). En toile de fond, dresser ces chefs contre celui qui n’écarte pas l’éventualité de sa candidature en 2020 «parce que la nouvelle Constitution le lui permet ».
Après avoir défait son alliance politique avec Alassane Ouattara, Henri Konan Bédié, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire-Rassemblement démocratique africain (Pdci-Rda), a donc convoqué quelque 300 chefs traditionnels et têtes couronnées Baoulé à Yamoussoukro, ville natale du fondateur du Pdci. Face à eux, il a fait un procès en règle d’Alassane Ouattara, assorti d’un réquisitoire qui met en lumière, plusieurs griefs et autres charges dont la «trahison » de la parole donnée. Il faut dire que Bédié a vraiment conditionné mentalement et psychologiquement ces chefs, militants indécrottables, dans leur écrasante majorité, du Pdci.
Face à ces autorités traditionnelles, l’ancien chef de l’État a crié sa colère contre son ex-allié et son parti, le Rhdp. La sentence qui s’en est suivie, n’est autre que "la "déchéance’’, d’Alassane Ouattara de son prestigieux nom de baptême Baoulé « Allah-Gnissan ».
Selon Bédié, « Ouattara a refusé de soutenir le Pdci en 2020», ce qui le rend inapte, aujourd’hui, à porter ce nom qui symbolise la bonne foi. Le refus de Ouattara de soutenir un candidat du Pdci voulu par Bédié en 2020, est le fondement de la guerre qui les oppose, a-t-il expliqué. « Désormais, Alassane Ouattara ne s’appellera plus Allah-Gnissan. Nous mettons fin à l’alliance avec Alassane Ouattrara et le Rhdp. À partir d’aujourd’hui, il n’y a plus d’Allah-Gnissan . Faites-moi confiance. Nous allons continuer de protéger l’œuvre si chère au président Félix Houphouët-Boigny, en mettant fin à notre alliance avec Alassane Ouattara et le Rhdp. Il n’y a plus de Allah-Gnissan », s’est enragé l’ancien président ivoirien. « Quant aux émissaires d’Alassane Ouattara, qui ont sillonné récemment le pays Baoulé, ils ont écouté les réponses cinglantes que vous leur aviez faites, et même le mépris qui a accompagné leur accueil. D’ailleurs, vous auriez pu prendre alors l’option de les huer. Et puisque vous ne l’aviez pas fait, je vous demande maintenant de les huer. Il faut les huer encore, Amédé Kouakou et ses compagnons », a lâché Henri Konan Bédié, visiblement ulcéré. « N’accordez aucun crédit aux propos de tous ceux qui sont venus et qui viennent vous dire que seul le parti unifié est capable de garantir la paix et la stabilité en Côte d’Ivoire. Il faut rappeler que le Pdci est un parti qui continue de prôner les valeurs enseignées par le président Houphouët-Boigny. Et le Pdci-Rda existe bien avant le parti unifié », a-t-il encore fait valoir, pour expulser toute la rage qu’il a du mal à contenir.
Bédié, qui a pris ses distances vis-à-vis d’Alassane Ouattara, mise aujourd’hui sur une colère voire une révolte généralisée. Ce tribunal devant lequel il a traduit Ouattara, et qui gérait le pacte et l’accord qu’il a passé avec son allié d’hier, se veut un jury de souveraineté traditionnelle, qui détient une autorité spirituelle sur les populations du grand centre.
En "débaptisant" Alassane Ouattara et en demandant aux garants des traditions de « huer » les envoyés du président du Rhdp, en fustigeant « l’achat des consciences avec l’argent des Ivoiriens, avec les intimidations, avec les limogeages », le « Sphinx de Daoukro » a intentionnellement livré à la vindicte voire à la férocité de cette chefferie, le numéro 1 ivoirien. Il n’est pas impossible que certains d’entre eux, après ce procès de Bédié, changent de posture vis-à-vis du président du Rhdp. Il a surtout expliqué que son ex-allié, Alassane Ouattara, a « refusé » de soutenir un candidat de son parti à la présidentielle de 2020, « contrairement aux promesses faites ».
Avec cette sortie musclée de Bédié, hier, contre Ouattara et ses supporters, et qui n’a pas manqué de soulever la colère de certains chefs, l’on peut dire aujourd’hui que le cap de non retour semble avoir été franchi entre les deux hommes.
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