Comment vit-on quand on partage des terres avec le Mali, un pays en proie aux assauts djihadistes ? Notre équipe de reportage revient de Tengrela.
Sur la carte de la Côte d’Ivoire, Tengrela apparaît comme un pic dans le Mali. Incrusté dans ce pays voisin. Alors, lorsque des djihadistes sèment la mort au centre et au nord du Mali, on a des inquiétudes. Quand une vidéo fake news circule sur les réseaux sociaux, évoquant d’éminentes attaques, on s’affole. « S’affoler ? Ici, non. Personne ne panique ici », nous dit un chasseur revenant des champs avec son calibre 12. « Non, c’est juste un fusil de chasse. Je l’emmène avec moi pour les animaux, surtout les perdrix que je peux croiser. » Son arme n’a donc rien à voir avec une quelconque protection personnelle.
A l’entrée de la ville, rien ne distingue Tengrela des autres chefs-lieux de département. Les gens vaquent tranquillement à leurs occupations. Le marché est bondé. Pas comme à Adjamé, évidemment mais tous les étals sont occupés. Pas de box vides.Chaque commerçant gère ses clients.
A la gare routière de la ville, les camions chargent tranquillement. Les uns à destination des villes ivoiriennes, les autres vers le Mali.
Les produits agricoles notamment ananas, avocat, banane, gombo et d’autres fruits sont les plus exportés au Mali. « Si on avait peur, on n’allait pas envoyer des camions remplis de marchandises au Mali. Vous me croyez non ? » Difficile de répondre par la négative au camionneur.
En face de la gare routière, la mairie. Les locaux, à notre arrivée, sont quasiment vides « Noonnn rien à voir avec une quelconque peur. Tout le monde est tous les jours à son poste. Sauf qu’aujourd’hui, on est frappé par un deui. En dehors de ceux qui doivent assurer la permanence, les autres employés sont allés au cimetière », nous dit un agent.
Quand nous repassons le lendemain, tout le monde est à son poste. « Quand je sors de chez moi, je ne pense pas à une attaque djihadiste ».
Koné Seydou, l’un des maires résidents de Tengrela (3e adjoint au maire) n’a point peur. « De loin, les gens s’inquiètent pour nous. On reçoit des coups de fil mais la vie est normale ici. Au quotidien, on ne voit pas de gens affolés».
Quand ils sortent de leurs bureaux, les élus de Tengrela ne sont pas assaillis de questions par leurs administrés sur la sécurité. Mais plutôt sur l’amélioration de leurs conditions de vie. A quand l’électrification de tous les quartiers de la ville ou quand reprendront les travaux de bitumage des rues de Tengrela. « En tant qu’élus, nous sommes conscients des menaces qui planent sur la zone frontalière avec le Mali et prenons au sérieux toute menace mais, ce n’est pas le branlebas à Tengrela».
La nuit venue, nous avons parcouru quelques quartiers. Tengrela, jusqu’à l’arrivée du Président Ouattara, était une cité complétement enclavée.
Certes, le bitumage de la route Boundiali-Tengrela a énormément changé le quotidien des populations de Gbon, Kolia, Kouto et Tengrela mais, ces villes n’ont pas encore rattrapé leur retard. Elles sont sur la bonne voie avec la détermination des élus et cadres mais il y a encore du chemin à faire pour avoir le niveau d’animation d’une pleine ville. Tengrela reste donc un gros village. Où le jour ne se poursuit pas toute la nuit. Une cité dans laquelle les noctambules se comptent. « Ici, ceux qui sortent la nuit se connaissent. Les endroits où aller la nuit tombée ne sont pas nombreux. Mais cela est aussi dû à l’éloignement de la ville ». Tengrela, c’est 776 km d’Abidjan. « C’est difficile pour ceux qui l’auraient voulu de venir passer le week-end ici. Surtout que l’enclavement par le passé a donné une image de ville perdue ».
Dix ans en arrière, il fallait, de la capitale économique de la Côte d’Ivoire, deux jours pour rallier Tengrela. Conséquence, ce n’est pas beaucoup de monde qu’on voit dehors les nuits. Sur le plan purement sécuritaire, Tengrela bénéficie des mesures de prévention mises en place par les autorités ivoiriennes. La police, la gendarmerie et les unités de l’armée détachées dans la zone veillent grandement au grain.
Les autorités administratives échangent régulièrement avec les différentes communautés pour les sensibiliser à la vigilance. Chacun ayant sa petite partition à jouer dans la gestion des menaces djihadistes. « On n’a pas peur mais on veille. La vigilance est de mise », dit le 3e adjoint au maire Koné Seydou.
Les mouvements de personnes entre les deux pays ne laissent aucun doute. Il y a ceux qui passent d’un pays à l’autre sans même le savoir. Notamment les agriculteurs et les chasseurs. Leurs champs et lieux de chasse se trouvent de part et d’autre de la frontière sans qu’aucune matérialisation ne le leur signifie. « Quand tu poursuis une perdrix, tu ne cherches pas à savoir si tu as dépassé la frontière ou pas. D’ailleursmême, comment tu vas faire pour le savoir ? Il n’y a aucun signalement dans la brousse », nous a dit un chasseur. C’est dans un tel contexte où toute piste villageoise permet de passer d’un pays à l’autre que des propriétaires de motos et tricycles se sont transformés en transporteurs. Des pas seurs ne partageant pas forcément la volonté des deux pays à un contrôle strict des frontières. Quand on ajoute à ce phénomène des agents en charge de la surveillance des frontières peu enclins à rejeter les billets de banque, on a une idée du nombre de personnes qui passent d’un pays à l’autre sans aucun contrôle.
La Côte d’Ivoire a pris, au haut niveau, très au sérieux les menaces que font courir au pays les percées djihadistes au Burkina Faso et au Mali. Le Conseil national de sécurité a tenu de nombreuses réunions sur la menace djihadiste avant même qu’elle ne se présente à nos portes. D’importants investissements ont été consentis, sur instruction du Président de la République, à la sécurité nationale.
Les équipements adéquats et bien modernes ont été mis à la disposition des unités opérationnelles. Il y a aussi et surtout la formation des hommes qui a été et est toujours inscrite au chapitre des priorités. La Côte d’Ivoire dispose aujourd’hui de soldats rompus à la lutte contre le djihadisme. Elle a même des hommes et femmes à Tombouctou et Gao.
Elle dispose aussi d’encadreurs chevronnés. Étant eux-mêmes des commandos ou forces spéciales. La présence des unités en charge de la sécurisation rassure les populations. Lesquelles populations sont associées via les préfets, à la gestion quotidienne des risques. Tout ce dispositif concourt à la sérénité.
A l’entrée de la ville, rien ne distingue Tengrela des autres chefs-lieux de département. Les gens vaquent tranquillement à leurs occupations. Le marché est bondé. Pas comme à Adjamé, évidemment mais tous les étals sont occupés. Pas de box vides.Chaque commerçant gère ses clients.
A la gare routière de la ville, les camions chargent tranquillement. Les uns à destination des villes ivoiriennes, les autres vers le Mali.
Les produits agricoles notamment ananas, avocat, banane, gombo et d’autres fruits sont les plus exportés au Mali. « Si on avait peur, on n’allait pas envoyer des camions remplis de marchandises au Mali. Vous me croyez non ? » Difficile de répondre par la négative au camionneur.
En face de la gare routière, la mairie. Les locaux, à notre arrivée, sont quasiment vides « Noonnn rien à voir avec une quelconque peur. Tout le monde est tous les jours à son poste. Sauf qu’aujourd’hui, on est frappé par un deui. En dehors de ceux qui doivent assurer la permanence, les autres employés sont allés au cimetière », nous dit un agent.
Quand nous repassons le lendemain, tout le monde est à son poste. « Quand je sors de chez moi, je ne pense pas à une attaque djihadiste ».
Koné Seydou, l’un des maires résidents de Tengrela (3e adjoint au maire) n’a point peur. « De loin, les gens s’inquiètent pour nous. On reçoit des coups de fil mais la vie est normale ici. Au quotidien, on ne voit pas de gens affolés».
Quand ils sortent de leurs bureaux, les élus de Tengrela ne sont pas assaillis de questions par leurs administrés sur la sécurité. Mais plutôt sur l’amélioration de leurs conditions de vie. A quand l’électrification de tous les quartiers de la ville ou quand reprendront les travaux de bitumage des rues de Tengrela. « En tant qu’élus, nous sommes conscients des menaces qui planent sur la zone frontalière avec le Mali et prenons au sérieux toute menace mais, ce n’est pas le branlebas à Tengrela».
La nuit venue, nous avons parcouru quelques quartiers. Tengrela, jusqu’à l’arrivée du Président Ouattara, était une cité complétement enclavée.
Certes, le bitumage de la route Boundiali-Tengrela a énormément changé le quotidien des populations de Gbon, Kolia, Kouto et Tengrela mais, ces villes n’ont pas encore rattrapé leur retard. Elles sont sur la bonne voie avec la détermination des élus et cadres mais il y a encore du chemin à faire pour avoir le niveau d’animation d’une pleine ville. Tengrela reste donc un gros village. Où le jour ne se poursuit pas toute la nuit. Une cité dans laquelle les noctambules se comptent. « Ici, ceux qui sortent la nuit se connaissent. Les endroits où aller la nuit tombée ne sont pas nombreux. Mais cela est aussi dû à l’éloignement de la ville ». Tengrela, c’est 776 km d’Abidjan. « C’est difficile pour ceux qui l’auraient voulu de venir passer le week-end ici. Surtout que l’enclavement par le passé a donné une image de ville perdue ».
Dix ans en arrière, il fallait, de la capitale économique de la Côte d’Ivoire, deux jours pour rallier Tengrela. Conséquence, ce n’est pas beaucoup de monde qu’on voit dehors les nuits. Sur le plan purement sécuritaire, Tengrela bénéficie des mesures de prévention mises en place par les autorités ivoiriennes. La police, la gendarmerie et les unités de l’armée détachées dans la zone veillent grandement au grain.
Les autorités administratives échangent régulièrement avec les différentes communautés pour les sensibiliser à la vigilance. Chacun ayant sa petite partition à jouer dans la gestion des menaces djihadistes. « On n’a pas peur mais on veille. La vigilance est de mise », dit le 3e adjoint au maire Koné Seydou.
La frontière, officiellement, est fermée depuis l’apparition de la Covid-19 en Côte d’Ivoire. En dehors des camions de marchandises et de quelques personnes disposant d’autorisation spéciale, personne ne devrait traverser la frontière. Comment veiller au respect d’une telle mesure dans une zone où il y a autant de frontières que de forêts qui relient les deux pays ? « Autant de mètres il y a, autant de pistes il y a et autant de frontières il y a entre le Mali et la Côte d’Ivoire », nous a-t-on dit à Tengrela.Frontières poreuses ?
- Comment fermer mille frontières
Les mouvements de personnes entre les deux pays ne laissent aucun doute. Il y a ceux qui passent d’un pays à l’autre sans même le savoir. Notamment les agriculteurs et les chasseurs. Leurs champs et lieux de chasse se trouvent de part et d’autre de la frontière sans qu’aucune matérialisation ne le leur signifie. « Quand tu poursuis une perdrix, tu ne cherches pas à savoir si tu as dépassé la frontière ou pas. D’ailleursmême, comment tu vas faire pour le savoir ? Il n’y a aucun signalement dans la brousse », nous a dit un chasseur. C’est dans un tel contexte où toute piste villageoise permet de passer d’un pays à l’autre que des propriétaires de motos et tricycles se sont transformés en transporteurs. Des pas seurs ne partageant pas forcément la volonté des deux pays à un contrôle strict des frontières. Quand on ajoute à ce phénomène des agents en charge de la surveillance des frontières peu enclins à rejeter les billets de banque, on a une idée du nombre de personnes qui passent d’un pays à l’autre sans aucun contrôle.
La quiétude dans laquelle baignent les populations riveraines des frontières nord de la Côte d’Ivoire repose sur la confiance qu’elles ont en leurs institutions. Notamment en l’armée, la gendarmerie et la police.
- La population dort... l’armée veille
La Côte d’Ivoire a pris, au haut niveau, très au sérieux les menaces que font courir au pays les percées djihadistes au Burkina Faso et au Mali. Le Conseil national de sécurité a tenu de nombreuses réunions sur la menace djihadiste avant même qu’elle ne se présente à nos portes. D’importants investissements ont été consentis, sur instruction du Président de la République, à la sécurité nationale.
Les équipements adéquats et bien modernes ont été mis à la disposition des unités opérationnelles. Il y a aussi et surtout la formation des hommes qui a été et est toujours inscrite au chapitre des priorités. La Côte d’Ivoire dispose aujourd’hui de soldats rompus à la lutte contre le djihadisme. Elle a même des hommes et femmes à Tombouctou et Gao.
Elle dispose aussi d’encadreurs chevronnés. Étant eux-mêmes des commandos ou forces spéciales. La présence des unités en charge de la sécurisation rassure les populations. Lesquelles populations sont associées via les préfets, à la gestion quotidienne des risques. Tout ce dispositif concourt à la sérénité.
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