Plus rien ne va entre les victimes des tueries dans le pays wê (de 2002 à 2011) et leurs avocats jusque-là connus, Maîtres Habiba Touré du barreau de Seine-Saint-Denis en France, et Dadjé Rodrigue du barreau d'Abidjan en Côte d'Ivoire. Cette information, qui circulait sous forme de rumeur au sein des différentes communautés wê à travers le monde, vient d'être confirmée par Martine Kéi Vao, présidente des deux associations regroupant les victimes ayant saisi la Cour pénale internationale (Cpi). A savoir : l’Ong Solidarité du peuple wê (Spw) et l’Association des ressortissants de Duékoué vivant en France (Ardef-e). A une conférence à Paris dans la soirée du vendredi 10 mai 2019, Martine Kéi Vao a fait le grand déballage.
Origine de la plainte
« Le 17 juin 2011, en qualité de présidente de l’Ardef-e, j’ai répondu à l’appel à témoins de la Cpi (lancé début juin 2011 invitant les victimes à se manifester car une procédure avait été initiée par l’État de Côte d’Ivoire) par l’envoi d’un dossier à la cour. C’est après (en novembre 2011) que le président Gbagbo a été déporté à la Cpi, avec son ministre Blé Goudé », a fait savoir Martine Kéi Vao. Elle explique avoir pris attache, en mai 2012, avec Me Basile Besnard, avocat français, pour l’assister dans ses démarches auprès de la Cpi. « Me Besnard a écrit au ministère des Affaires étrangères et au président de l’Assemblée nationale de France pour demander une enquête parlementaire ou une rencontre avec Laurent Fabius. Malheureusement, pour des raisons politiques, Me Besnard nous a dit qu’il ne pouvait plus suivre notre dossier », a dit la conférencière. Par la suite, souligne-t-elle, grâce à Amédée Akpané, un compatriote qu’elle a connu un peu plus tôt, elle a été mise en contact avec Me Habiba Touré avec qui elle a parlé de la situation des victimes des tueries de Duékoué. D’ailleurs, glisse Mme Kéi Vao, c'est Amédée Akpané qui lui a proposé d’élargir le champ d’action au niveau des autres départements wê étant donné que les victimes dont il s’agit n’étaient pas toutes de Duékoué. D’où la création en 2015- après une tournée en Italie, Grande Bretagne, Suisse, Etats-Unis et Canada pour consulter les frères et sœurs Wê- de l’Ong Solidarité du peuple wê (Spw) qui étend la prise en compte des victimes au-delà du département de Duékoué.
Après plusieurs mois de contacts, Martine Kéi Vao et Me Habiba Touré signent, dit-elle, une convention fixant les honoraires de l'avocate à 7.50 euros (soit environ 5000 f. cfa) par dossier (victime). La convention confie la collecte des informations auprès des victimes aux associations qui les transmettent aux avocats pour traitement puis validation par les deux parties avant la transmission du dossier final à la Cpi. « Le jour de la signature de la convention, Me Touré m’a présenté Me Rodrigue Dadjé, avec qui elle dit avoir toujours partagé des dossiers. Selon ses dires, Me Dadjé devait s’occuper en Côte d’Ivoire, de la validation des formulaires de victimes que lui transmettraient nos représentants chargés de la collecte des dossiers à travers les contrées du pays wê. La transmission des dossiers à Me Touré ou à son collaborateur Me Dadjé en Côte d’Ivoire n’engendrait aucun frais financier », précise Mme Kéi Vao.
De cette collaboration, Martine Kéi Vao informe que l’Ong Spw a collecté un lot de 1100 dossiers (715 au Ghana et 385 à Duékoué) qu’elle a transmis aux avocats. Ceux-ci, sur la base de leurs actions coordonnées, ont abouti en avril 2016 à la recevabilité du dossier par la Cpi qui a fait une déclaration officielle à cet effet.
Discorde
L’amour était parfait entre les victimes représentées par les responsables des deux associations wê et les avocats. Mais cet amour fut de courte durée, puisque, selon la présidente de Spw, dans la suite de la collaboration, contrairement à la première procédure, elle a constaté avec stupeur que pour le 2e lot de 3000 dossiers (collectés par leurs soins auprès des victimes membres de leurs associations) transmis aux avocats, ces derniers ont refusé de leur rendre compte. « Le conseil, argue-t-elle, prétend que ce lot de 3000 dossiers qui serait hautement confidentiel, lui aurait été recommandé par les victimes directement ». Cela paraît suspect aux yeux de Martine Kéi Vao. Elle s’engage donc à dessaisir Me Touré Habiba et Me Dadjé Rodrigue du dossier. La Cpi en est saisie par courrier, l’informant en conséquence que les nouveaux avocats des victimes wê devant le tribunal international sont désormais Me François Epoma et Me Simé.
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