
Ce jeune homme que, pour des raisons évidentes, nous appellerons Kader, est tout sourire. Ce vendredi, ce chômeur de 29 ans a les moyens d’inviter sa copine au maquis, s’acheter quelques clopes et, s’il serre bien sa ceinture, assurer son petit déjeuner du lendemain. Il vient de croiser la route d’un « démarcheur » à la solde d’un gros bonnet de la scène politique ivoirienne.
3000 F CFA le jour du vote
Celui-ci lui a proposé un billet de 2000 francs CFA contre son changement de circonscription électorale.Kader est d’Adjamé où il a l’habitude de voter. Le « démarcheur » l’a convaincu de s’inscrire au Plateau où son « patron » se présente pour les élections municipales de 2017. Et s’il glisse son bulletin dans la « bonne urne » le jour de l’élection, Kader aura droit à 3000 francs CFA supplémentaires. Marché conclu !
30 mille électeurs pour 8000 habitants
Des changements de circonscription électorale, la Côte d’Ivoire en a enregistrés 244 680 depuis les dernières élections. Rien que pour le Plateau, 23 607 cas ont été recensés pour 30 000 électeurs. Ahurissant ! D’autant que cette commune ne compte que 8000 habitants. « C’est trop gros », s’était exclamé le vice-président de la Commission électorale indépendante (Cei), Gervais Coulibaly, vendredi dernier, lors de la remise aux partis politiques, de la liste électorale en vue des prochaines législatives.
Une pratique aux conséquences énormes
Gervais Coulibaly avait invité les formations politiques à lutter contre cette pratique qui chahute le jeu politique. Sa plaidoirie, davantage qu’un appel à l’aide, est un appel au secours : « Ce phénomène a pris une telle importance qu’il nous faut le résoudre rapidement, parce que ça fausse les données géographiques et ça a des conséquences énormes sur les statistiques. J’aimerais vous demander, vous partis politiques, de nous aider à trouver la solution amiable à ce problème. »
Son message a peu de chance d’être entendu. La transhumance d’électeurs est devenue en Côte d’Ivoire une véritable industrie profitable à l’électeur, qui est assuré d’avoir son billet de banque, au « démarcheur », qui empoche sa commission, et au candidat, qui s’offre une voix potentielle de plus à chaque opération de transfert.
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