Le géniteur le plus prolifique de l’histoire du monde est un Africain. Il s’agit du Marocain Moulay Ismail.
Moulay Ismail, contemporain de Louis XIV, est considéré comme le véritable fondateur de la dynastie alaouite. Ce mégalomane régna sur le Maroc pendant cinquante-cinq ans : un record de longévité pour un monarque absolu. Mais, ce tyran, qui ne tarda pas à se voir affublé du surnom de l’ « Assoiffé de sang », détient un autre record selon le Guinness Book : celui d’avoir engendré 888 enfants. Mais cela est-il seulement possible ou est-ce une pure légende ? Telle est la question posée Elisabeth Oberzaucher et Karl Grammer du département d’anthropologie de l’Université de Vienne (Autriche) dans une étude publiée en février 2014 dans la revue PLoS One.
Ces deux chercheurs ont utilisé les données du Père Dominique Busnot, diplomate au Maroc en 1704. Il y rapportait que l’empereur chérifien, alors âgé de 57 ans, avait eu 600 enfants avec ses quatre femmes et 500 concubines.
« Il était d’une bonne taille, maigre, de teint foncé avec un visage long et mince. Il avait le nez fort et une de ses oreilles était déchirée », rapporte Joseph de Léon, ancien captif du sultan alaouite. Il avait « le visage long, plutôt noir que blanc, c’est-à-dire fort mulâtre », indique le baron de Saint-Amans, ambassadeur de Louis XIV, ajoutant qu’il était « l’homme le plus fort et le plus vigoureux de ses Etats. »
Dans son palais de Meknès, ville modeste qu’il transforma en cité impériale, Moulay Ismail fit régner la terreur dans son harem. Les filles de ses femmes étaient autorisées à vivre tandis que celles nées de ses concubines étaient étouffées à la naissance par les sages-femmes. L’empereur du Maroc aurait eu environ 1171 enfants en 32 ans, période entre sa prise de pouvoir à l’âge de 25 ans et l’année correspondant aux faits consignés par le diplomate français.
Aux infanticides des filles s’ajoutait la barbarie. Toute femme du harem soupçonnée d’adultère était étranglée des mains mêmes du souverain ou avait les seins tranchés ou encore les dents arrachées. Un châtiment qui s’appliquait également aux ex-concubines qui devaient quitter le harem après l’âge de 30 ans. Quant aux hommes qui approchaient ses femmes ou ses concubines, ils étaient mis à mort.
Ce tyran était-il aussi un géniteur hors norme ? Pour tenter de répondre à cette question, les anthropologues autrichiens ont pris en compte une donnée comportementale dans leurs estimations du taux de conception, en l’occurrence que les femmes puissent avoir un visage plus attirant au moment de l’ovulation.
Plusieurs travaux ont montré que la période d’ovulation s’accompagne de modifications de la structure du visage (et du corps), qui rendent les femmes plus attirantes pour leurs partenaires réguliers ou occasionnels. En d’autres termes, les calculs des chercheurs sont basés sur la possibilité d’une attraction sexuelle accrue lors de la période la plus propice à la fécondation au cours du cycle menstruel.
Les chercheurs ont introduit plusieurs autres paramètres susceptibles d’influer à la baisse le nombre possible d’enfants engendrés par ce souverain accro au sexe : le tabou culturel consistant à ne pas avoir de rapport sexuel pendant les cinq jours correspondant aux règles, les fausses couches, la mortalité infantile, sans oublier l’effet de l’âge sur le pouvoir fécondant du sperme (diminution de 1,52% par an). Par ailleurs, ils ont estimé à 18 mois (durée de la grossesse et temps de l’allaitement), le délai avant qu’une femme ne retrouve sa place d’esclave sexuelle dans le harem.
Selon les modèles utilisés, il ressort que Moulay Ismail aurait dû se livrer en moyenne à 1 à 2 rapports sexuels par jour pour parvenir à engendrer une progéniture si importante. Plus précisément, sur la période considérée de 32 ans, le nombre quotidien d’accouplements devrait être au minimum compris entre 0,83 et 2,3 par jour pour parvenir à engendrer 1171 enfants, selon les modélisations.
Un rapport sexuel quotidien était suffisant pour que Moulay Ismail engendre l’imposante descendance qu’on lui attribue, selon un des modèles utilisés. Dans une autre simulation, lorsque la qualité du sperme en fonction de l’âge était prise en compte, la possibilité de faire coïncider l’acte sexuel à la période d’ovulation s’avérait cruciale pour que l’objectif de 1171 enfants puisse être atteint. Dans un troisième modèle, il s’avérait impossible que ce nombre soit atteint à raison d’un seul rapport sexuel quotidien sans que l’on ait pris en compte la détection de l’ovulation.
Les chercheurs ont également déterminé le nombre de femmes dont ce satire aurait eu besoin pour obtenir autant de rejetons. Il s’avère que son harem n’aurait pu théoriquement compter que 65 ou 110 beautés, soit nettement moins que les 504 femmes qu’il aurait asservies.
L’histoire de Moulay Ismail, géniteur prolifique, a peut-être inspiré le scénario de Fonzy (octobre 2013, remake de Starbuck, film canadien) dans lequel José Garcia incarne le père de 533 enfants issus de dons de sperme. Mais en comparaison avec l’épouvantable record du roi sanguinaire, le personnage de cette fiction peut aller se rhabiller.
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