Ça y est, le « taxieur » et l’« alphabète » sont à bon port. Tous deux viennent de rejoindre Le Petit Larousse illustré. Ils font partie des 100 nouveaux mots entrés dans le millésime 2020 du dictionnaire. Ils rejoignent les 2 000 régionalismes et termes de la francophonie déjà consignés entre 63 500 mots. « Le “taxieur” est d’origine algérienne et signifie comme on s’en doute chauffeur de taxi », rappelle le linguiste Bernard Cerquiglini, conseiller scientifique chez Larousse, qui précise aussi que l’« alphabète » est né au Burundi pour signifier celui qui sait lire et écrire.
A ceux qui se demanderaient comment on n’avait pas imaginé plus tôt cette forme positive du très usité analphabète, l’universitaire répond par « l’inventivité africaine ». Celui qui a des années durant été à la tête de l’Agence universitaire de la francophonie rappelle volontiers que ce continent est assez en pointe en matière de vocabulaire, même si tous les mots français utilisés là-bas ne sont pas repris par une vieille Europe qui parfois les snobe un peu.
« Un dictionnaire du français mondial »
C’est quand même là, plus précisément en Côte d’Ivoire, qu’est né le « boucantier », entré lui aussi au dictionnaire cette année. Il manquait un substantif pour signifier celui qui aime afficher son aisance matérielle et son style de vie ostentatoire, « bref, quelqu’un qui joue les sapeurs », terme lui-même entré en 2016, résume Bernard Cerquiglini, assez adepte de ce vocabulaire nouveau, qui inclut aussi l’ambianceur, arrivé, lui, un an après, en 2017.
Le linguiste estime que son rôle de conseiller scientifique est bien de faire évoluer Le Petit Larousse illustré vers « un dictionnaire du français mondial » en y mettant « les mots de la conversation ». A ses yeux, c’est une fidélité à l’esprit du fondateur du petit dico aux pages roses. « Lorsque des mots africains y entrent, nous sommes fidèles à l’esprit Larousse qui, dès 1905 pour fixer la langue réelle de son temps, a consigné des termes régionaux. Aujourd’hui, notre langue française est mondiale. On la parle à Paris et au Québec, mais aussi à Dakar et à Bujumbura », ajoute-t-il. Pas question donc pour les lexicologues d’inventer quoi que ce soit. Ils sont là pour être à l’écoute de la rumeur du monde francophone et espionner ce qui se dit dans les conversations sur le marché de Cotonou comme celui d’Aubervilliers.
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