Et la vie quotidienne des Ivoiriens s’est améliorée
70% ont désormais accès à l’eau et à l’électricité, ils peuvent bénéficier d’une assurance maladie universelle en cours de déploiement depuis un an. Ces avancées ultra rapides font rêver d’un « retour au bon vieux temps », selon l’économiste Denis Cogneau, celui de la présidence d’Houphouët-Boigny. Mais beaucoup trop d’Ivoiriens sont exclus de ce petit miracle : d’après la Banque mondiale près d’un habitant sur deux vit au-dessous du seuil de pauvreté, avec moins de 737 FCFA par jour, soit 1,10 euro.
C’est un échec de la présidence Ouattara ?
Pas tout à fait. L’étude menée par l’Institut national de la statistique et la Banque mondiale conclut au contraire qu’il y a eu un net recul de la pauvreté entre 2012 et 2018, en valeur relative. C’est aussi la conclusion de l’économiste Denis Cogneau, qui a effectué une étude sur le revenu des ménages ivoiriens sur la période 2010 et 2014. Mais en valeur absolue la poussée démographique anéantit ces progrès. Étant donné que la population a fortement augmenté depuis dix ans, le nombre de pauvres est passé de 10 à 11 millions de personnes. Si les Ivoiriens sont trop peu nombreux à profiter des retombées de la croissance, c’est aussi parce que les inégalités de revenus demeurent très fortes : 1% de la population capte 17% du revenu national – en France c’est à peu près moitié moins – selon les chiffres de 2014 fournis par le World Inequality Database. Le rendement de l’impôt est encore très faible, il stagne à 18% du PIB. Dans les pays avancés de l’OCDE, c’est deux fois plus. Cela limite donc les politiques de redistribution.
Malgré une croissance record, la Côte d’Ivoire n’a pas réussi non plus à se hisser au statut de pays émergent
Difficile de déceler l’activité motrice qui permettra à l’économie de décoller, selon Denis Cogneau, qui a examiné les comptes à la loupe. Une année, les télécoms portent la croissance, une autre les cours généreux du cacao, parfois la consommation des ménages ou les investissements. La Côte d'Ivoire a misé sur sa spécialisation agricole. La croissance a surtout été portée par une pratique extensive de l’agriculture, en défrichant des terres, pour développer l’anacarde, la noix de cajou au nord du pays et pour doper la production de cacao. Elle dépasse aujourd'hui les deux millions de tonnes, contre 1,5 million il y a dix ans. Un modèle qui n’est pas soutenable, prévient Denis Cogneau, « parce que l’extension des surfaces cultivées ne peut pas se poursuivre indéfiniment. Sans hausse sensible de la productivité, cette croissance extravagante va finir par s’assécher. »
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