Plusieurs équipes de pays musulmans doivent concilier jeûne et préparation. Et doivent trouver des astuces.
Quand un joueur simule au football, c’est en général pour obtenir une faute ou gagner du temps. Mais parfois, c’est aussi pour assouvir des besoins primaires. Gardien de la sélection tunisienne qui prépare sa Coupe du monde, Mouez Hassen a feint d’être touché après un contact lors de la seconde période du match amical contre la Turquie (2-2) vendredi soir. Une « blessure » qui coïncidait avec le moment de la rupture du jeûne du ramadan, observé par la plupart des joueurs des Aigles de Carthage.
Si l’astuce peut faire sourire, elle montre tout l’enjeu du mois sacré de l’islam pour les sélections issues des pays musulmans engagés à la Coupe du monde. En Russie, elles seront sept : l’Arabie saoudite, l’Egypte, le Maroc, le Nigeria, l’Iran, le Sénégal et la Tunisie. Les cinq premières risquent même de disputer leur premier match de compétition pendant le ramadan, qui doit se terminer autour du 15 juin.
Que disent les textes sacrés sur le sujet ? La plupart des théologiens de l’islam se rejoignent sur le fait que les footballeurs peuvent être considérés comme des travailleurs soumis à des conditions pénibles ou, dans le cadre d’une compétition à l’étranger, à des voyageurs. Ils peuvent donc reporter leurs jours de jeûne après la compétition.
En équipe de France, le débat a été tranché dans ce sens. Interrogé en conférence de presse sur le sujet, l’attaquant de l’OL Nabil Fékir a expliqué qu’aucun des joueurs musulmans retenus par Didier Deschamps ne jeûnait. Une décision également prise au Mondial 2014 et à l’Euro 2016 par le meneur de jeu allemand Mesut Özil, soucieux d’être à 100 %. Car la pratique n’est pas recommandée d’un point de vue médical.
« Le jeûne donne de la force »
« Sport et jeûne ne font pas bon ménage, souligne Patrick Bacquaert, médecin-chef de l’Institut de la recherche, du bien-être, de la médecine et du sport-santé (IRBMS). La problématique majeure, c’est la déshydratation qui peut affecter la performance du joueur et provoquer des blessures comme des tendinites ou des claquages. Comme la personne mange tard, cela peut décaler sa digestion et perturber son sommeil et sa récupération. »
« D’un côté, vous avez l’avis des médecins et des entraîneurs qui vous conseillent de bien boire et bien manger, estime Karim Haggui, ex-international tunisien. Mais de l’autre, il y a un aspect personnel à ne pas négliger. Jeûner peut être ressenti comme un besoin mental et donner de la force à un joueur. Si vous le privez de cela, il sera peut-être déçu et cela le perturbera sur la pelouse. »
Pour éviter de tendre les rapports avec leur groupe, la plupart des sélectionneurs intègrent le jeûne dans leur préparation du Mondial. Mais si le sélectionneur tunisien, Nabil Maâloul, a détaillé lundi, tout sourire, l’astuce de son gardien pour permettre à ses partenaires de se restaurer en plein match, d’autres sont plus inquiets par la chose.
« C’est une situation spéciale avec le ramadan. Les joueurs ne boivent pas, ne mangent pas. Ça s’est senti », a glissé le technicien argentin à la tête de l’Egypte, Hector Cuper, après le nul de son équipe vendredi en amical contre la Colombie. Des spécialistes ont été recrutés par la fédération pour l’assister dans sa préparation du groupe, déjà perturbée par l’incertitude autour de sa star Mohamed Salah.
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