À quelques mois de l’élection présidentielle d’octobre 2025, le Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA) traverse une période de turbulences internes qui pourraient compromettre sa capacité à se présenter comme une alternative crédible au pouvoir en place. Entre contestations sur la légitimité de son président, Tidjane Thiam, et divisions internes, le parti historique est confronté à des défis majeurs.
Une Présidence Contestée : Le Cas Tidjane Thiam
Élu à la tête du PDCI-RDA en décembre 2023, Tidjane Thiam, ancien dirigeant de grandes institutions financières internationales, a rapidement été confronté à des contestations internes. La principale critique porte sur sa double nationalité franco-ivoirienne, certains membres estimant qu'il ne répond pas aux critères d'éligibilité définis par la Constitution ivoirienne pour la présidence du parti et, par extension, pour une candidature à la présidentielle.
Des Déclarations Contradictoires sur sa Nationalité
La question de la nationalité de Tidjane Thiam a suscité des débats intenses au sein du PDCI-RDA et sur la scène politique ivoirienne. Les positions des leaders du parti sont variées, parfois contradictoires :
• Tidjane Thiam a affirmé avoir renoncé à sa nationalité française pour se conformer aux exigences constitutionnelles. Il a déclaré : « Nous avons effectué ce matin une démarche importante (...) qui a consisté à aller déposer ma demande de libération de la nationalité française, qui me permettra d'être exclusivement de la nationalité ivoirienne au moment de l'élection ».
• Valérie Yapo, membre du Bureau politique du PDCI-RDA, conteste sa légitimité. Elle affirme que Thiam dirige le parti en tant que citoyen français, s’appuyant sur l’article 48 du code de la nationalité ivoirienne, qui stipule que l'acquisition volontaire d'une nationalité étrangère entraîne la perte de la nationalité ivoirienne.
• Simon Doho, député du PDCI, voit dans ces attaques des manœuvres politiques. Il dénonce : « C'est un combat pour la démocratie, pour la justice, pour une démocratie apaisée dans notre pays ».
• Les avocats de Thiam défendent sa position, affirmant qu’il est Ivoirien de plein droit, né de parents ivoiriens. Ils insistent sur le fait que la renonciation à la nationalité française a été effectuée selon les lois en vigueur, et que cela suffit pour recouvrer pleinement sa citoyenneté ivoirienne .
• Des juristes divergent : certains estiment que Thiam a perdu sa nationalité ivoirienne en devenant Français en 1987. D'autres, comme Me Kouamé Faustin, soutiennent qu'il est Ivoirien par attribution et que sa démarche de renoncement à la nationalité française est suffisante.
Malgré ces assurances, la contestation a persisté, menant à des procédures judiciaires et à une crise de leadership au sein du parti.
Des Divisions Internes Profondes
Au-delà de la question de la nationalité de Thiam, le PDCI-RDA est miné par des divisions internes. Jean-Louis Billon, ancien ministre et figure influente du parti, a officiellement déclaré sa candidature à la présidentielle de 2025, critiquant la gouvernance actuelle et l’inaction perçue du parti. Il a également exprimé des réserves quant à la manière dont la convention d’investiture du parti pourrait être organisée, n'excluant pas une candidature indépendante en cas de dysfonctionnement.
La situation de Maurice Kacou Guikahué, ancien secrétaire exécutif en chef du PDCI-RDA, illustre également les tensions internes. Après avoir vu sa candidature à la présidence du parti invalidée en décembre 2023 en raison d'un contrôle judiciaire, il a annoncé son retrait de la course, déplorant un « manque flagrant de solidarité » au sein du parti.
Par ailleurs, des cadres supposés proches de Tidjane Thiam ayant occupé des postes de responsabilité dans la campagne de 2023 ont depuis rallié le RHDP, suscitant des interrogations sur la solidité de son entourage et sur la capacité du PDCI à conserver ses ressources humaines stratégiques.
Des tensions sont également apparues dans certaines régions, notamment dans le Haut-Sassandra et la Marahoué, où des cadres du parti sont accusés de manœuvres pour faire échouer Tidjane Thiam. Des enseignants militants ont appelé à un retour à l’unité, estimant que les actions de certains membres nuisent à la cohésion interne du parti.
Une Tentative de Rassemblement
Conscient des tensions internes, Tidjane Thiam a tenté de calmer les esprits en levant les sanctions disciplinaires contre certains militants et en appelant à l’unité. Lors d'une interview sur TV5 Monde, il a déclaré : « Dans un esprit d’apaisement, j’ai estimé qu’il valait mieux supprimer cette sanction. Il ne s’agissait que d’un cas isolé ».
Cependant, ces gestes n'ont pas suffi à apaiser toutes les tensions, et le parti reste divisé à l'approche des élections.
Une Mobilisation de la Base Militante
Malgré les crises internes, le PDCI-RDA a réussi à organiser des primaires en avril 2025, avec un taux de participation de plus de 90 % dans les 378 bureaux de vote à travers le pays. Cette mobilisation de la base militante montre que le parti conserve un soutien populaire important, mais cela suffira-t-il à surmonter les divisions internes ?
Conclusion : Un Avenir Incertain où le pire et le meilleur cheminent ensemble
Le PDCI-RDA se trouve à un tournant crucial de son histoire. Les divisions internes, les contestations sur la légitimité de son président et les tensions régionales menacent sa cohésion et sa capacité à se présenter comme une alternative crédible lors de la présidentielle de 2025. Il est impératif que le parti trouve rapidement un consensus et renforce son unité pour espérer jouer un rôle majeur dans l'avenir politique de la Côte d'Ivoire.
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