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Et si c’était lui… Henri Konan Bédié le futur président ?

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Et si c’était lui… Henri Konan Bédié le futur président ?

Depuis qu’Henri Konan Bédié, le patron du PDCI, a déclaré qu’il présenterait un candidat pour 2020, les rumeurs vont bon train. Mais l’ancien président n’a pas dit son dernier mot.

Le salon d’Henri Konan Bédié ne désemplit jamais. Entrepreneurs, diplomates, politiques en vue ou en difficulté, on ne compte plus ceux qui, chaque jour, viennent quémander les bonnes grâces du vieux chef. Tous sont prêts à attendre des heures pour être reçus dans sa villa cossue de Cocody, à Abidjan, ou à s’infliger les 235 km de route caillouteuse qui mènent à Daoukro lorsque le Sphinx se retire dans son fief. Depuis que le président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) a assuré, en juillet, dans les colonnes de Jeune Afrique, qu’il présenterait un candidat pour la prochaine présidentielle de 2020, le ballet ne cesse pas. Même les plus importantes figures de l’État n’ont pas rechigné à faire l’aller-retour pour se rendre dans l’appartement bourgeois du 16e arrondissement de Paris où Bédié s’était installé pendant de longs mois : Guillaume Soro, le turbulent patron de l’Assemblée nationale, puis Daniel Kablan Duncan, le vice-président, accompagné de plusieurs membres du gouvernement, ont fait le déplacement en juillet.

Mais si chacun espère désormais entendre le nom du futur candidat échapper des lèvres du chef, rares sont ceux qui réussissent à obtenir plus que quelques mots en forme d’onomatopées et une poignée de main. « De toute façon, Bédié ne dit jamais rien. Vous pouvez poser les questions de mille manières, c’est toujours la même chose : au bout de cinq heures, vous repartez, et Bédié a à peine daigné ouvrir la bouche », grommelle un ministre ivoirien.

Une stratégie du silence et du flou que le Sphinx pratique à la perfection depuis des décennies. « Celui qui prétend savoir ce qu’il a prévu est un menteur », prévient l’un de ses plus proches conseillers.

Figure emblématique du PDCI

Dans un parti frustré par sa non-participation à la dernière élection présidentielle, en 2015 (Bédié s’était rallié dès le premier tour à la candidature pour un second mandat d’Alassane Ouattara, son allié du Rassemblement des Républicains, le RDR), les prétendants ne manquent pas, et les intrigues sont incessantes.

Parmi les cadres historiques, Jeannot Ahoussou Kouadio mise ainsi sur ses bonnes relations avec Ouattara et se pose en interlocuteur de la chefferie baoulée, l’ethnie du Centre qui représente historiquement la base électorale du PDCI.

« Il travaille son image d’homme de consensus et tente d’être incontournable », analyse un observateur de la vie politique ivoirienne.

Un positionnement que lui dispute Charles Diby Koffi, le président du Conseil économique et social, qui travaille également ses bonnes relations avec Guillaume Soro.

Patrick Achi et Noël Akossi Bendjo ont aussi de l’ambition. À leurs côtés, la jeune garde du parti s’organise. Outre Bertin Kouadio Konan, qui n’a jamais fait mystère de ses appétits et qui est revenu dans le giron du PDCI en juin, Jean-Louis Billon a récemment développé sa stratégie de communication sur les réseaux sociaux.

Persuadé de sa bonne étoile, l’ancien ministre travaille son image de jeune technocrate dynamique et sait qu’il peut compter sur la fortune familiale.

Que des rumeurs

Parmi tous ces candidats, aucun ne parvient pourtant à se détacher. « Pour Bédié, le choix du cœur aurait été Emmanuel Niamien N’Goran », confie un des cadres du PDCI.

Originaire de Bongouanou, il est l’un des rares à pouvoir revendiquer sa proximité avec l’ex-président : les deux hommes n’ont jamais démenti les rumeurs leur prêtant un lien de parenté (Niamien N’Goran serait le neveu de Bédié), alors même que cela n’est que pure fable.

La défaite de l’ancien inspecteur d’État aux législatives de 2016, dans le fief même de Bédié, a néanmoins anéanti la possibilité que ce Baoulé embrasse un destin national.

« À trois ans de la présidentielle, Bédié estime qu’il est bien trop tôt pour désigner qui que ce soit. Lâcher un nom, ce serait à coup sûr semer la zizanie dans le parti », explique le proche conseiller de Bédié.

Fin tacticien, le président du PDCI manœuvre pour que personne n’émerge et s’emploie à brouiller les pistes. Plusieurs fois par an, le remaniement de la direction du parti redistribue les cartes, les remerciements et les disgrâces.

Un jeu derrière lequel beaucoup voient se dessiner une candidature de Daniel Kablan Duncan. « Il fait tout pour le préserver, car il est le vrai présidentiable. C’est ce qu’Houphouët avait fait avec lui, il l’avait dénigré et ainsi les regards s’étaient détournés. Mais en réalité il était bel et bien positionné », estime l’observateur ivoirien.

Vice-président, ancien Premier ministre, le technocrate est loué pour son intégrité et sa force de travail. Vice-président du PDCI et très proche d’Alassane Ouattara, il pourrait faire figure de choix de raison en cas de poursuite de l’alliance avec le président ivoirien au sein du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP).

Certains rappellent pourtant le peu de complicité entre Bédié et Duncan. « Bédié n’a jamais voulu de Duncan. C’est contraint et forcé qu’il a accepté sa nomination à la primature, puis à la vice-présidence », souligne un diplomate.

Henri Konan Bédié, de retour ?

Face aux incertitudes, un ultime nom circule : celui de Bédié lui-même. À 83 ans, le Sphinx pourrait-il tenter un retour à la tête de l’État ? Il n’a en tout cas jamais caché ses envies de revanche, après sa chute de la présidence de la République, lors du coup d’État de 1999, et plus encore après sa disqualification au premier tour de l’élection présidentielle de 2010.

Une élimination qu’il a toujours dénoncée, estimant que 600 000 voix lui avaient été volées. L’appel, en août dernier, « des militants du PDCI France », à une candidature de leur président en 2020, a également alerté.

« Bédié est aujourd’hui le seul à faire l’unanimité dans le parti », analyse un politologue. Désormais envisagée dans l’entourage du chef de l’État, l’hypothèse reste balayée par la plupart des cadres du PDCI. « Aujourd’hui, il a tous les avantages du pouvoir sans en avoir les inconvénients. Pourquoi se jetterait-il dans une bataille épuisante ? » assure l’un d’eux, rappelant le goût de son chef pour les belles choses et l’argent.

Aucun obstacle juridique ne s’oppose en tout cas à un dernier combat d’Henri Konan Bédié. Depuis octobre 2016, la limite d’âge pour être candidat à la magistrature suprême a été levée.

Deux ans auparavant, c’était celle qui lui interdisait de briguer une nouvelle fois la présidence de son parti que le Sphinx avait supprimée. Il avait alors prévenu : « La politique, c’est l’art de l’impossible. Ce qu’on n’ose imaginer peut devenir réalité. »

 
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