« On parle de près de 63 milliards FCA [environ 95,7 millions d’euros] de manque à gagner. Il est essentiel d’aller faire cette dénonciation au niveau du procureur pour que ce dossier ne puisse pas être enterré », explique Ali Idrissa, responsable du Réseau nigérien pour la transparence et l’analyse budgétaire (Rotab). Le Rotab est l’une des ONG à l’origine de la plainte déposée le 11 mai au parquet de Niamey après des révélations de malversations dans des services publics.
Cette saisie de la justice fait suite aux anomalies soulignées par la Cour des comptes dans son rapport annuel remis au président Mohamed Bazoum le 19 avril dernier. Elle y avait passé au crible la gestion des services, entreprises publiques, collectivités territoriales et projets financés par des
bailleurs étrangers.
Surfacturations
Le rapport révèle des surfacturations, des dépenses sans base légale, l’absence de pièces justificatives pour des achats de matériels ou la construction d’infrastructures, de fausses mises en concurrence dans les marchés publics ou encore « l’octroi d’avantages indus » à des responsables. Des achats d’équipements dans le cadre de la lutte contre le Covid-19 ont par exemple été effectués à des « coûts non raisonnables ».
Pour se justifier devant la Cour, le ministère de la Santé publique, chargé de la gestion du Covid-19, a mis en avant « la demande nettement supérieure à l’offre dans un climat de panique générale où les pays n’étaient pas en position d’imposer aux fournisseurs un quelconque conformisme de prix ».
Ministre écroué
Le président Bazoum, qui a fait de la lutte contre la corruption l’une de ses priorités, avait appelé lors de sa prise de fonction en avril 2021 différents acteurs de la société, dont les ONG, à l’aider dans ce domaine.
Le chef de l’État a récemment indiqué qu’ « une trentaine de hauts cadres de l’État, coupables de malversation ou détournement, croupissent actuellement en prison et y resteront longtemps ».
Le ministre de la Communication, Mahamadou Zada, a ainsi été écroué pour son implication présumée dans une affaire de détournement de trois milliards de FCFA (plus de 4,5 millions d’euros) lorsqu’il dirigeait une entreprise publique entre 2013 et 2021.
En 2020, une affaire de surfacturations d’achats et de livraisons non effectuées d’équipements militaires, pour un montant de 39,4 milliards de FCFA (59,4 millions d’euros), avait déjà fait grand bruit au Niger. Un procès sur cette affaire doit se tenir, à une date qui doit encore être fixée.
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