277 employés au chômage, les activités en berne dans le département
L’unité de transformation de bois NSD Danané, propriété du groupe Thanry Côte d’Ivoire qui exploite des unités à Guiglo et Duékoué est fermée depuis le 12 mai 2016 après une descente musclée d’hommes en armes, se présentant comme des agents des eaux et forêts. Depuis lors, 277 travailleurs, y compris les plus hauts responsables de l’usine sont au chômage. Avec eux, tous ceux qui vivaient directement ou indirectement des activités de cette unité de production sont dans le désarroi total, implorant tous les dieux de la terre pour leur salut. Ils sont exploitants de charbon de bois, restaurateurs ou livreurs de charbon.
A Danané, tout le monde s’interroge encore sur cette situation inédite. La fermeture de l’usine n’est pas une décision de la direction générale des Impôts, mais elle est effective et aucun employé n’a accès à l’enceinte, sous haute surveillance armée depuis ce 12 mai.
Une opération comme au temps de la toute-puissance des Frci
Des faits, tels que relatés par les travailleurs dans un point de presse, il ressort que deux fois de suite (le 10 et le 12 mai) des hommes en armes se présentant comme des agents des eaux et forêts se sont présentés aux portes de l’usine dans l’après-midi.
« Le mardi 10 mai 2016, à 16 h 25, une équipe d’agents des eaux et forêts dont certains abhorraient des tenues bigarrées, circulant à bord d’un véhicule banalisé, se présente à l’entrée du site de NSD (Thanry Côte d’Ivoire) et demandent à entrer en son sein, à l’effet d’y effectuer un contrôle. Au lieu de présenter leur ordre de mission aux vigiles qui le réclament, les agents les intimident en brandissant leurs armes et cordelettes. Sans résistance de la part des vigiles, ils ouvrent eux-mêmes le portail et pénètrent ainsi sans autorisation sur le site », indique notre informateur, lui-même employé de l’usine. Lequel ajoute que c’est vers 17 h 55 que ces prétendus agents des eaux et forêts ressortent du site avec un procès-verbal qui mentionne la saisie de 12.500 billes pour diverses infractions. Notamment, le refus de présenter des documents statistiques, le non-marquage des billes, et la non-existence de Brh (Bordereau de route homologué, un document qui accompagne généralement le convoyage des grumes à l’usine, Ndlr). Le même procès-verbal, relève notre source, convoque les dirigeants de la société à une rencontre dans la période du 23 au 30 mai 2016 au siège de l’ « Unité spéciale d’intervention » du ministère des eaux et forêts à Abidjan. Lesdits agents n’attendront pas cette date avant de fermer l’usine le 12 mai.
En protestation, les responsables de l’usine ont saisi le Dg des eaux et forêts avec ampliation au ministre et à son directeur de cabinet. Ils y dénoncent la violence avec laquelle l’opération a été menée à l’absence d’un ordre de mission dûment signé et s’interrogent avec quelle alchimie 4 agents ont pu dénombrer 12.500 billes non marquées en l’espace d’une heure et en l’absence de tout agent de la société.
Jusqu’à ce jour, aucun ordre officiel de fermeture n’est parvenu à la direction de l’entreprise, indique-t-on par ailleurs. Comme on peut le comprendre, cette fermeture est consécutive à un contrôle inopiné à bord d’un véhicule banalisé et violant les habitudes en la matière. En effet, depuis un certain temps, une affaire de pillage de forêts classées à l’Ouest du pays alimentait les conversations et des articles de presse. Un contrôle du ministère s’imposait donc. Mais celui-ci obéit à des règles élémentaires.
La réaction du directeur général de l’usine Jean Claude Gillet
C’est justement cette violation des principes en la matière et qui a tout l’air d’un harcèlement qu’a voulu dénoncer le DG (français) Jean Claude Gillet en refusant de signer le PV qui lui a été présenté par les ‘’contrôleurs’’. Il l’a dit dans un entretien à Fraternité Matin dans sa livraison du mercredi 25 mai 2016. « Des véhicules sans immatriculation, avec à leur bord des hommes équipés de gilets pare-balles et armés de grenades, se sont présentés au portail de l’usine le 10 mai dernier. Pour des raisons sécuritaires, nous leur avons refusé l’accès à l’usine. Les occupants du véhicule ont forcé le portail pour pénétrer à l’intérieur de l’établissement sous la menace de leurs armes. Ils se sont dirigés vers le parc à grumes qu’ils ont visité. Ils sont ensuite revenus et m’ont demandé pourquoi je n’ai pas répondu aux questions. Ils ont, à la hâte, dressé un PV dénombrant une quantité de 12 500 billes stationnées dans le parc. Nous nous posons la question. Comment en une heure, ces agents ont-ils pu dénombrer 12 500 bois ? Ainsi, ils ont établi un PV qu’ils m’ont demandé de signer. Ce que j’ai refusé de faire ».
Sur l’accusation de pillage (bois non marqués et non homologués), les dirigeants de l’usine ne se sentent pas concernés. Ils indiquent que les bois gardés dans leur parc sont achetés avec des exploitants forestiers tiers agréés pour 75 %, le reste provenant des périmètres agréés et exploités par la société.
Les contre-arguments de Thanry sur les accusations du PV
En ce qui concerne le non-marquage des billes et le nombre exact de bois dans le parc, la société a commis un huissier, Me Dion Auguste, (Etude sise derrière Epp 4 Blessaleu, dernière villa à droite) à l’effet de faire l’état des lieux. Ce dernier a été stoppé par les nouveaux surveillants du site. Mais dans son rapport d’étape, il mentionne que le nombre de billes au 10 mai 2016 était de 2 638 et non 12 500. Mieux, il fait savoir que les bordereaux de route homologués (Brh) existent (550 au total, de janvier 2016 au 10 mai 2016) et portent les logos de la Sodefor et du ministère des Eaux et Forêts, « estampillés pour certains de leurs cachets secs ou encrés et des signatures des agents dudit ministère ». Le huissier fait ensuite remarquer que, humainement parlant, « le comptage des bois de grumes de telles envergures et ainsi empilées ne peut être effectué dans un si court laps de temps (une heure, ndlr) »
A titre de rappel, les dirigeants de la société font savoir dans un document transmis à connectionivoirienne, qu’ils n’ont jamais dérogé à leurs obligations vis-à-vis de l’Etat et des populations. A titre d’exemple, la société a reboisé 506 ha terrain en 2015 et versé un peu plus de 79 millions de FCFA, la même année, au titre des taxes de reboisement à l’Etat. En ce qui concerne le social, Thanry a construit le lycée municipal Gilles Thanry de Guiglo, des bâtiments administratifs, réhabilité des routes et entretenu régulièrement des pistes villageoises. Elle emploie sur l’ensemble de ses sites, 1 500 emplois directs.
Source : connectionivoirienne.net
0 Commentaires
Participer à la Discussion
Commentez cet article