C’est officiel, le Burundi a interdit le concubinage en 2018. Après l’avoir annoncée en mai dernier, le président Nkurunziza a mis en application sa décision critiquée par certaines organisations qui dénoncent une « violation des droits de l’homme ».L’ultimatum a pris fin. Lors d’un discours le 1er mai dernier, le président du Burundi Pierre Nkurunziza avait ordonné à tous les couples vivant en union libre de se marier avant la fin de l’année 2017. Une « campagne de moralisation de la société », comme l’appelait le président, qui touchait plus de 165 000 ménages selon un haut cadre du ministère de l’Intérieur, cité par RFI.
Plusieurs mois plus tard, la date butoir dépassée, environ deux-tiers de ces ménages « illégaux » ont régularisé leur situation, « plus de 66% » d’entre eux, a précisé le gouverneur de Bururi, Christian Nkurunziza qui se dit satisfait. Après le discours du président, il a reçu, comme les tous les autres gouverneurs de province, une lettre du Ministre de l’Intérieur leur demandant d’« appliquer la tolérance zéro à tous les ménages en union libre ainsi qu’à toute personne qui s’adonne à la polygamie ou à la polyandrie », tout en prenant « des mesures énergiques » pour mener à bien cette régularisation.
Accueil mitigé
Si la nouvelle n’a fait aucun bruit dans notre partie du globe, les organisations de défense des droits de l’homme l’ont froidement accueillie, y voyant une atteinte à la liberté individuelle de deux adultes qui ont décidé de vivre ensemble sans se marie
Du côté des citoyens, les avis sont plus partagés, selon le journaliste burundais Egide Nikiza. Certains, majoritairement chrétiens, félicitent l’initiative du président. C’est le cas de Cyprien et Jeanine. Pour ces deux conjoints récemment mariés, la régularisation a permis d’obtenir une meilleure cohabitation et une meilleure sécurité, surtout pour Jeanine, qui est dorénavant « protégée par la loi », déclare-t-elle à AfricaNews. À l’inverse de ce couple, les musulmans parlent eux d’une décision contre leurs croyances, indique le journaliste. Pour d’autres, ceci est simplement un problème économique. La dot à payer auprès des parents est trop chère, estiment-ils. En effet, comme dans plusieurs pays africains, son prix frôle souvent des sommes exorbitantes, expliquant la réticence de certains hommes.
Amendes et sanctions
Sensibilisation, pressions, menaces de sanctions… Tous les moyens ont été bons pour convaincre les ménages de se marier avant la nouvelle année, rapporte RFI. Pour convaincre les indécis, le gouvernement burundais a également proposé d’« accompagner » le couple pour réduire les frais liés aux mariages, en organisant même des cérémonies festives collectives.
Ceux qui ne se sont pas dit oui avant 2018 s’exposent désormais à des amendes et bien plus encore. « Si l’on inflige une peine allant d’un mois à trois mois, une amende de 100 000 à 200 000 (francs burundais) et qu’il devient récalcitrant, il sera emprisonné jusqu’à ce qu’il régularise », précise la loi burundaise selon le site français.
Mais dans quel but ?
Avec cette « campagne de moralisation », le président burundais veut lutter contre la surpopulation, les grossesses non désirées ou encore faire aimer son pays. Pierre Nkurunziza entend également protéger veuves et orphelins quant à la question de l’héritage, après le décès de leur conjoint ou père respectifs. Au Burundi, il n’est pas rare de voir les familles chasser enfants et compagne du défunt pour obtenir les biens de ce dernier s’il n’était pas marié.
Au-delà de ces objectifs, pour Egide Nikiza, cette nouvelle loi est davantage une décision « religieuse », alors que le pays se dit laïc. Un responsable d’une ONG qui dénonçait « une violation des droits de l’Homme » va encore plus loin. Il évoque une campagne de « croisade religieuse » contre l’adultère menée selon lui par le président Nkurunziza et son épouse, tous les deux des chrétiens évangéliques « born again », « né une seconde fois dans la foi ».
Parismatch.be
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