Les conservateurs, majoritaires à la Chambre des représentants depuis janvier, accusent le dirigeant démocrate d'avoir menti au peuple américain sur les entreprises de son fils cadet, Hunter Biden. Pour certains républicains les plus à droite, les fonctions passées de Joe Biden lui ont facilité la tâche, explique notre correspondant à Washington, Guillaume Naudin.
Lors de la première audition parlementaire consacrée à cette procédure, le chef de la commission d'enquête de la Chambre, James Comer, a assuré avoir « trouvé une quantité écrasante de preuves démontrant que le président Biden a abusé de ses fonctions publiques pour que cela profite financièrement à sa famille ». « Durant des années, le président Biden a menti au peuple américain au sujet de sa connaissance et de sa participation aux affaires corrompues de sa famille », a déclaré l'élu républicain du Kentucky.
12 000 pages de documents bancaires
L'enquête est balayée d'un revers de main par les démocrates. « Si les républicains avaient une quelconque preuve irréfutable, ils seraient en train de les présenter aujourd'hui », a moqué Jamie Raskin. « La commission a reçu 12 000 pages de documents bancaires. Et pas une seule page ne montre que le moindre centime est allé au président Joe Biden. Nous avons reçu 2 000 pages de rapports, nous avons tenu des auditions et eu des entretiens avec tout le monde, et malgré cela, nous n’avons trouvé aucune preuve de malversation du président Biden. Ils n’ont rien sur Joe Biden », explique le représentant du Maryland Jamie Raskin.
L'élu a accusé ses collègues républicains de mener cette investigation uniquement en raison des « pressions » de Donald Trump, lui-même mis en accusation deux fois par le Congrès, et qui avait réclamé cette enquête contre son successeur. Pour l'un des témoins auditionnés par la commission, un juriste célèbre pour ses analyses sur la chaine ultraconservatrice Fox News, « une enquête oui, mais des motifs de destitution, à ce stade, non ».
Hunter Biden, ancien homme d'affaires de 53 ans, est devenu une cible privilégiée de la droite américaine. Les élus lui reprochent notamment d'avoir fait des affaires douteuses en Ukraine et en Chine alors que Joe Biden était vice-président de Barack Obama (2009-2017), en capitalisant sur le nom et les réseaux de son père. La Constitution américaine prévoit que le Congrès peut destituer le président en cas de « trahison, corruption ou autres crimes et délits majeurs ».
Un casse-tête pour la Maison Blanche
Le président de 80 ans a toujours soutenu publiquement son fils, au passé semé d'addictions, également aux prises avec la justice, accusé de détention illégale d'arme à feu. « Je me lève tous les jours [...] sans me focaliser sur la destitution. J'ai un travail à faire. Je dois m'occuper des problèmes qui affectent le peuple américain tous les jours », avait-il déclaré en septembre.
Si cette investigation n'a quasiment aucune chance d'aboutir, elle pourrait se transformer en casse-tête pour la Maison Blanche avant la présidentielle de 2024, à laquelle Joe Biden est candidat. La procédure se déroule en deux étapes. Après avoir mené son enquête, la Chambre des représentants vote, à une majorité simple, des articles de mise en accusation détaillant les faits reprochés au président : c'est ce qui s'appelle « impeachment » en anglais. À ce stade, « je ne pense pas que les preuves actuelles permettent de justifier des articles de mise en accusation », a estimé un des témoins de l'audition de jeudi, le professeur Jonathan Turley, de l'université George Washington.
Si la mise en accusation venait toutefois à être votée, le Sénat, chambre haute du Congrès, ferait alors le procès du président. Il serait néanmoins très probablement acquitté, le parti de Joe Biden étant majoritaire dans cette chambre.
L'ouverture d'une procédure de destitution est réclamée depuis des mois par l'aile trumpiste du parti républicain, avec laquelle le président de la Chambre, Kevin McCarthy, a dû faire de nombreux compromis pour accéder au perchoir en janvier.
Jamais un président n'a été destitué dans l'histoire américaine. Trois ont été mis en accusation : Andrew Johnson en 1868, Bill Clinton en 1998 et Donald Trump en 2019 et en 2021. Mais tous ont été finalement acquittés. Richard Nixon avait préféré, lui, démissionner en 1974 pour éviter une destitution certaine par le Congrès en raison du scandale du Watergate.
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