
Une salle de consommation à moindre risque, également qualifiée de « salle de shoot », va être inaugurée ce mardi 11 octobre à Paris. Une première en France. Elle sera accessible quelques jours plus tard.
Situé dans un bâtiment de l’hôpital Lariboisière, avec une entrée discrète et autonome, l’Espace Gaïa se trouve au cœur de la plus importante zone de consommation de drogue de la capitale. A quelques pas de là, dans une petite place rectangulaire adossée à la gare du Nord, où n'arrive jamais le soleil mais seulement les courants d'air et les puanteurs d'urine, des hommes au visage dévasté sont avachis sur un bout de trottoir. Ils s'injectent comme ils peuvent de la drogue dans les veines.
Visage creux, regard fixe, Medhi vient de s'injecter un dérivé de morphine dans les veines. pense que l'ouverture de l'Espace Gaïa est salutaire. « Ça évitera qu’on fasse ça dans la rue, où il y a des enfants. C’est pas très cool qu’ils nous voient taper nos shoots ici. En plus, s’ils nous fournissent de quoi nous shooter, ça nous évitera de faire ça avec des seringues usagées », confie-t-il.
Avec sa tenue soignée, Eléonore ressemblerait à une assistante de direction si on ne croisait pas son regard aux abois et ses ongles jaunis. Quand elle se pique, elle fuit ses camarades de la gare du Nord, elle préfère la clandestinité des toilettes publiques. Elle se rendra dans la salle de consommation à moindre risque. « Je trouve que ça ne peut pas être pire que maintenant. L'autre fois, je voyais un garçon qui faisait ça devant les fenêtres de quelqu'un. Là au moins, on sait où c'est ; si ça ne leur plaît pas, ils ne passent pas devant », lâche la jeune femme.
Une mesure réclamée depuis des années
La mesure était réclamée depuis des années par les associations d’aide aux toxicomanes les plus précaires, qui s’injectent leur dose à la va-vite dans les toilettes publiques, les parkings, les halls d’immeuble ou directement sur les trottoirs de certains quartiers, comme celui-ci.
Assis sur une marche, Johan fume du crack. Il a 28 ans, mais en fait dix de moins. Sous sa capuche émerge un visage de gamin, au regard bleu qui électrise. « Je vais aller voir comment ça se passe, parce que j’ai eu des accidents au bras. Il y a quelques jours, j’ai essayé de m’injecter : impossible. Donc, j’ai d’abord demandé conseil avant de faire n’importe quoi », explique le jeune homme, prenant l’exemple de certains qui se font des injections au cou, « des endroits où il ne faut surtout pas faire. »
Seul Mohamed est réticent à l'ouverture de cette salle qui est, selon lui, une entrave à la liberté. « Les gens aiment bien être libres, ils n’aiment pas tout ce qui est hôpitaux… être isolés », affirme-t-il. Le froid glace les mains ce jeudi soir, mais Mohamed, lui, dit avoir très chaud. Il explique avec calme que c'est dû à la montée du produit.
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