La consommation d’alcool illégal a de nouveau tué 12 personnes dans le nord de l’Inde. Les contrebandiers produisent et vendent des mélanges hautement toxiques qui provoquent chaque année la mort de centaines d’individus parmi les Indiens les plus pauvres.
L’alcool frelaté fait encore des ravages en Inde, où 12 personnes de l’Etat d'Uttar Pradesh ont trouvé la mort ce lundi 10 juillet. Quatre autres sont encore hospitalisées. Ce type d’incident n’est pas rare dans le pays : environ 40% de la consommation d’alcool en Inde est produite illégalement, selon l'International Spirits and Wine Association of India.
Les décès sont généralement dus à l’ingestion de méthanol, que les contrebandiers mélangent à la boisson pour la rendre plus corsée. Il s’agit d’un liquide polaire, utilisé le plus souvent comme combustible, solvant industriel ou antigel, et facile à produire par combustion de bois. Les embaumeurs de l’Egypte antique s’en servaient d’ailleurs pour la momification des corps.
S’il est naturellement présent, à petite dose, dans le corps humain, l’intoxication aiguë au méthanol peut avoir des conséquences dramatiques en provoquant une acidose métabolique, une modification du PH du sang. Le sujet est alors victime d’une irritation digestive sévère et de troubles visuels pouvant conduire, s’il n’est pas traité à temps, à la cécité - et, au-delà de 30 millilitres, à la mort.
L’alcool clandestin omniprésent en Inde
Chaque année, le méthanol tue ainsi des centaines d’Indiens pauvres. 180 personnes ont perdu la vie au Karnataka en 2008 ; 100 autres au Gujarat en 2009 ; 162 encore au Bengale occidental en 2011. Cette année-là, un article du Figaro indiquait que le « Hooch », l’alcool de contrebande, était vendu à 12 roupies (16 centimes d’euros) le litre, soit moins du tiers du prix d’une bouteille d’alcool légale.
Interrogé par l’AFP, Johnson Edayaranmulah, le directeur du groupe de pression Indian alcohol policy alliance rapportait alors que l’alcool clandestin était omniprésent en Inde. « La loi n'est pas appliquée et il existe un lien contre nature entre les autorités, la police, les hommes politiques, les douanes et les contrebandiers ». Et d’ajouter : « La police accepte les pots-de-vin, les douaniers acceptent les pots-de-vin, tout le monde ferme les yeux. Cela montre que la corruption fait partie de l'état d'esprit indien ».
Un millier d’individus arrêtés en 2015
En juin 2015, le fléau s’était répandu dans le slum de Malvani, un bidonville du nord de Bombay. Il avait provoqué plus de 100 morts et révélé l’existence d’un gigantesque réseau de trafiquants. 3 000 individus avaient été soupçonnés lors de l’enquête menée par la police indienne, dont plus d’un millier avaient été arrêtés. 167 000 litres d’alcool avaient également été saisis.
Le réseau s’étendait dans tout le Maharashtra et aurait généré 57 millions de roupies (820 000 euros) en trois ans, selon les informations du Monde. Le cerveau de l’organisation était vraisemblablement une septuagénaire, Mainkaini Swami, 75 ans, connue sous le pseudo d’Akka. Celle-ci n’a pas été arrêtée.
Cette semaine, les forces de l’ordre ont interpellé 21 personnes en lien avec les morts d'Uttar Pradesh, selon l’AFP. L’agence Press Trust of India (PTI) a également indiqué que le ministre en chef de l’Etat, Yogi Adityanath, avait suspendu huit responsables du district, dont trois policiers. Mais ces mesures semblent dérisoires face à l’ampleur du trafic, qui produit encore chaque année deux milliards de litres d’alcool illégal.
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