Il y a un an, le 5 juin 2017, l’Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis, Bahreïn et l’Egypte rompaient leurs relations diplomatiques avec le Qatar et interrompaient leurs liaisons terrestres, aériennes et maritimes avec l’émirat. Les quatre pays à l’origine de cette mise à l’écart accusent le Qatar de soutenir des organisations extrémistes et lui reprochent aussi sa proximité avec l’Iran. Un an plus tard, l'émirat n’a pas modifié sa politique régionale et la crise s’installe dans la durée.
« Au début, j'étais assez optimiste, je pensais que c’était juste un petit nuage d’été qui allait passer. Mais la situation ne s’arrange pas », constate Hassan Al Ansari, ancien fonctionnaire qatarien aujourd’hui reconverti dans les affaires. « Heureusement que le Qatar a pu s’adapter », ajoute cet habitant de Doha, joint par RFI. Lorsque la crise du Golfe a éclaté le 5 juin 2017, de nombreux observateurs s’interrogeaient sur la capacité du petit émirat à résister à la pression exercée par ses puissants voisins.
Un an plus tard, le Qatar a limité l’impact de l’embargo sur son économie. Un nouveau terminal portuaire a permis la mise en place de routes d’approvisionnement alternatives. Dans les magasins, les produits venus de Turquie et d’Iran ont remplacé ceux qui venaient auparavant d’Arabie saoudite ou des Emirats arabes unis et une immense ferme a été construite en plein désert pour développer une production laitière nationale. Tout cela a eu un coût mais le Qatar est un géant gazier et il a puisé dans ses immenses réserves financières pour amortir le choc, injectant des dizaines de milliards de dollars dans son économie.
Depuis un an, les Qatariens ont toutefois découvert un isolement auquel ils n’étaient pas habitués. Il n’y a plus de liaisons directes entre Doha et les quatre pays qui ont rompu avec le Qatar et des restrictions de circulation sont désormais en vigueur. « Beaucoup de Qatariens ont de la famille en Arabie Saoudite, aux Emirats arabes unis ou à Bahreïn. Pour aller les voir ou qu’ils viennent nous rendre visite, c’est beaucoup plus compliqué », explique le Qatarien Hassan Al Ansari qui n’a pas vu ses cousins saoudiens depuis le début de la crise.
Face-à-face
L’Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis, Bahreïn et l’Egypte accusent le Qatar de soutenir des mouvements « terroristes » dans la région et d’être trop proche de l’Iran. Après un an de bras de fer, le Qatar n’a pas changé de politique et n’a cédé à aucune des exigences formulées par ses adversaires. Ces derniers ont notamment demandé la fermeture de la chaîne quatarienne al-Jazeera, l’un des vecteurs de l’influence de Doha dans le monde arabo-musulman. Les quatre pays qui ont rompu avec le Qatar considèrent que la chaîne de télévision véhicule des discours trop favorables aux Frères musulmans.
« Le pays qui est véritablement à l’origine du boycott du Qatar, ce sont les Emirats arabes unis, précise Stéphane Lacroix, enseignant à Sciences-Po et chercheur au CERI, et ce qui obsède les Emirats, ce sont les Frères musulmans. Ils les voient comme une force politique extrêmement bien implantée dans la région et susceptibles de remettre en cause leurs propres modèles politiques et donc de représenter une concurrence politique réelle. Et c’est vrai que les Frères musulmans l’ont démontré après les printemps arabes, à chaque fois qu’il y a eu des élections libres. La vraie cible des Emiriens, ce sont les Frères musulmans et le soutien que le Qatar apporte aux Frères musulmans ». Pour l’Arabie saoudite, la priorité régionale, c’est la lutte contre l’Iran. Le royaume ne supporte pas de voir le Qatar entretenir des relations apaisées avec Téhéran.
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