Interview / Larios Gode (Président de l’amicale des militants de Yopougon en Europe) : « L’église ne fait que jouer son rôle d’éveil des consciences et de lumière des nations»

Militant actif du parti de Gbagbo, vivant à Londres en Angleterre,  et président de l’amicale  des militants de Yopougon en Europe, Larios Godé suis avec attention l’évolution de l’actualité sociopolitique en Côte d’Ivoire. Dans cette interview, Il revient sur ce qui a fait l’actualité politique ces dernier temps, ainsi que sur la marche des chrétiens catholiques pour la paix qui fait couler beaucoup d’encres et de salives.   

Comment se porte l’amicale que vous dirigez depuis Londres ?

Merci de me donner la possibilité de faire une adresse au monde en général, et aux ivoiriens en particulier. Pour répondre à votre question, je peux vous assurer que notre amicale se porte très bien. Nous venons de tenir notre assemblée générale à Paris au début de ce mois de Janvier 2020. Laquelle assemblée Générale a connu un grand succès au-delà de nos attentes. Nous sommes en train de mettre en place certains organes pour plus d’efficacité sur le terrain et pour répondre aux nombreuses sollicitations d’adhésion. C’est vous dire que tout va bien au niveau de l’amicale.

Quel est votre regard sur l’actualité politique de la Côte d’Ivoire ?

Cette actualité est très riche en événements, et évolue très vite au regard des actes qui se succèdent avec une fréquence inhabituelle. Les actes posés par le gouvernement actuel se multiplient et vont malheureusement dans le mauvais sens relativement aux attentes des populations ivoiriennes. Ces actes appellent des réactions des parties prenantes de la vie politique, à savoir les partis politiques, la société civile et de plus en plus les religieux, tels les dirigeants de l’église catholique de Côte d’Ivoire.

Je vais m’attarder sur quelques uns de ces actes du gouvernement, pris dans un ordre pas forcément chronologique :

Condamnation de Blé Goudé à 20 ans par la justice ivoirienne

 Ici, nous voyons la légèreté de ce gouvernement et de sa justice. Car c’est bien une justice inféodée au gouvernement. Ce pouvoir judiciaire brade son indépendance à un pouvoir exécutif qui en réalité devrait être au même niveau d’importance dans la conduite des affaires du pays. Pour le reste, je pense que Blé Goudé lui-même a fait une adresse dans les médias en donnant tous ses sentiments de la meilleure des manières, et qui ne nécessite pas qu’on y revienne. On retiendra seulement que notre justice refuse de jouer tout son rôle et se fait balader, par les gouvernants, dans toutes sortes de boues qui ternissent son image et la rendent dégouttant aux yeux des populations. C’est simplement déplorable. Vivement que la justice se réveille pour être ce gendarme de bonne conduite pour tous, y compris les membres du gouvernement et leurs associés.

Mandat d’arrêt lancé contre Soro et arrestation de tous ses proches collaborateurs, dont des députés Sur ce point, plusieurs analyses ont été faites par plusieurs observateurs nationaux et internationaux, dont les membres de GPS (Générations et Peuples solidaires) sur les médias du monde. Pour notre part, cette attitude de notre justice rejoint ce que je disais plus haut, à savoir que cette justice est inféodée au pouvoir exécutif, donc au gouvernement. Et dans ces conditions, elle devient inefficace, voire nuisible pour une société en quête de justice. Un procureur aux méthodes floues qui se presse de sortir une bande sonore et la brandir comme pièce à conviction, mais sans être capable de la dater. Ou du moins sans vouloir la dater, bien que sachant la date, qui pourrait rendre nul son argumentaire. Ce manque de clarté nous rend dubitatif quant au zèle accompagnant les actes du procureur à l’encontre de Soro et ses compagnons.

Toujours en relation avec cette affaire, on emprisonne des députés sous immunité parlementaire arguant qu’ils ont été pris en flagrant délit d’on ne sait quoi, seul le procureur le sait. Et après cela, sans que le procureur ne demande de lever leur immunité, puisqu’en réalité il s’en fout pas mal et n’en a pas besoin pour achever ce qu’il a « si bien » commencé, voici qu’apparaît un groupe de parlementaires (RHDP) qui demandent la levée de l’immunité parlementaire de leurs collègues. Sur la base de quelle loi et pour quel but ? Seuls ces individus pourront répondre à ces interrogations. Peut-être veulent-ils faire du judiciairement correct pour justifier, après coup, l’emprisonnement des députés et dire qu’ils sont maintenant sans immunité. En tout cas c’est très maladroit et cela n’honore pas ses auteurs ! Mais, est ce que la notion d’honneur existe encore chez ces personnes ?

La CEI 

Le passage en force qui a donné la forme actuelle de la composition de la CEI, ne se justifie pas. Car l’opposition a montré sa bonne foi de participer activement, mais dans la vérité et la clarté, à la mise en place d’une CEI consensuelle et inclusive pour éviter ce qui nous est arrivé en 2011. Mais, contre toute attente on met sur la touche une partie significative de l’opposition et on sort une CEI qu’on veut imposer aux ivoiriens. Mais ça ne marche pas de cette manière. A moins que ces personnes qui passent en force ne pensent pouvoir prospérer  que dans des conditions de troubles généralisés. Cette imposture ne passera pas. Allons à la mise en place d’une CEI consensuelle, c’est tout.

Comment voyez-vous la présidentielle  dans ces conditions ?

On a l’impression que ce gouvernement fait tout pour museler l’opposition et aller seul aux élections pour être sûr de gagner la présidentielle 2020 haut les mains. Mais il se trouve là, dans un rêve et il gagnerait à vite se réveiller pour affronter la réalité, qui est que le peuple ivoirien ne se laissera pas conduire par des personnes qui le bafouent et le martyrisent. Ce peuple mérite de goutter aux délices des élections transparentes, joyeuses et apaisées que certaines nations autour de notre pays connaissent. Mais cela exige des gouvernants une attitude de discussions  ouvertes et sérieuses avec l’opposition politique. Tant que cela est fait et bien fait, la société civile et les religieux se contenteront d’accomplir leurs tâches quotidiennes dans le calme, et Dieu seul sait, s’ils en ont, les tâches ! 

Coalition PDCI – FPI, quel est votre commentaire ?

C’est une bonne chose pour mettre la pression sur ce pouvoir qui refuse tout compromis avec ses opposants, qui sont tout de même des ivoiriens, qui ont donc le droit de réclamer le meilleur pour les populations dont une très grande partie se reconnaît en eux. Logiquement tout pouvoir démocratique doit se plier à la volonté de la majorité. Et actuellement les chiffres montrent que toute l’opposition ivoirienne a la très grande majorité des ivoiriens avec elle. Et pour cause les actes de bâillonnement exercés par le pouvoir sur les populations à tous les niveaux ; hommes politiques, achat des élus du peuple pour rejoindre le parti au pouvoir ; petits commerçants, travailleurs du public, pressions fiscales insupportables, concours payants, etc.

 Quel commentaire faites-vous de la position de l’église catholique sur la situation socio politique de la Côte d’Ivoire ces derniers temps ?

L’église ne fait que jouer son rôle d’éveil des consciences et de lumière des nations. Elle attire l’attention des gouvernants sur la situation actuelle et les conséquences désastreuse qui en résulteront si rien n’est fait. Mais le gouvernement, au lieu d’en prendre acte et agir en conséquence, préfère aller à la confrontation, comme à son habitude,  en accusant ces hommes éclairés de supporter l’opposition politique. A ce jeu, le pouvoir pense rallier d’autres religieux à sa lugubre cause, et créer des clans pour reprendre la main dans la quête des électeurs, vu son très grand retard sur l’opposition. Est-ce que le pouvoir sait qu’à chaque messe, l’église catholique prie pour les autorités politiques et administratives du pays ? Comment peut-on être contre quelqu’un et prier chaque jour pour lui ?