dans un communiqué
dont nous avons reçu copie, le groupe de plaidoyer PTI fait le constat de ce
que l’élection présidentielle de ce samedi 31 octobre 2020 a été émaillée de
violences et de tensions.
Lire le communiqué du groupe de plaidoyers PTI
Ce samedi 31 octobre 2020, le groupe de plaidoyer PTI à
travers l’ONG indigo CI procède à l’observation de l’élection présidentielle de
2020 en Côte d’Ivoire. Les observateurs et observatrices d’Indigo Côte d’Ivoire
ont bénéficié d’une accréditation et d’une note circulaire de la Commission
électorale indépendante (CEI) pour suivre le déroulement des élections, de l’ouverture
à la proclamation des résultats.
Contexte:
Le Groupe de plaidoyer PTI voudrait rappeler que
l’environnement préélectoral était extrêmement dégradé et hostile à
l’organisation d’une élection apaisée et inclusive. En effet, l'observation à
long terme du processus politique et électoral, effectuée par INDIGO Côte
d’Ivoire sur toute l'étendue du territoire, a relevé que de nombreux incidents
sécuritaires préélectoraux, en lien avec l’appel à la désobéissance civile
contre le troisième mandat du Président sortant, le rejet des candidatures des
principaux leaders de l’opposition, ont profondément altéré la cohésion au sein
des communautés à la base. De nombreux affrontements intercommunautaires ont eu
lieu à Dabou, Bongouanou, Divo, Daoukro, Divo, Yakassé-Attobrou, et Sikensi.
Au regard de cette situation, le groupe de plaidoyer PTI a,
à trois jours du scrutin, fait des recommandations pour exhorter les
différentes parties à garantir le droit à la libre expression pour les
militants de chaque tendance politique, en l’occurrence le droit de vote et de
manifester. Aussi le groupe de plaidoyer a-t-il appelé le Gouvernement à
garantir à tous, la liberté d’exprimer des opinions différentes en toute
sécurité.
Hier, vendredi 30 octobre 2020, les CEL- Commissions
Electorales Locales - de Koun-Fao, de Kotobi, de Man et de Douandou (dans la
sous-préfecture de Bangolo), Morofé (dans la commune de Yamoussoukro), ont été
saccagées, les urnes, les isoloirs et bulletins de vote détruits et le siège du
RHDP Béoumi a été incendié par des inconnus. De plus, le centre de dépistage de
la COVID-19 de Koumassi Place Inch’allah a été incendié.
Méthodologie:
Indigo Côte d’Ivoire a procédé pour le compte du Groupe de
Plaidoyer, dans le cadre du Programme Transition et Inclusion Politiques (PTI),
au lancement d’une mission citoyenne d’observation à long terme par le
déploiement de 120 observateurs départementaux. Ces observateurs formés et
accrédités ont couvert toute la période pré-électorale, depuis mars 2020. Pour
le jour de scrutin, Indigo Côte d’Ivoire a recruté, formé et déployé 750
observateurs et observatrices fixes dont 47% de femmes et 63% de jeunes,
chargés du suivi des opérations de vote à l’intérieur des bureaux et 120
observateurs mobiles chargés de scruter l’environnement socio-politique et
sécuritaire dans lequel se déroule le scrutin. L’observation du jour de scrutin
obéit à une méthodologie systématique qui garantit la représentativité des
données d’observation à l’échelle nationale. Ce communiqué de presse de
mi-journée se base sur les rapports de 96% des observateurs déployés sur le
terrain.
Les observations de la mi-journée:
INDIGO Côte d’Ivoire note un retard dans l’ouverture des
bureaux de vote. Les troubles observés, notamment les barricades, qui ont
paralysé certaines zones ont retardé le vote.
Les agents de la CEI avertis de la menace ont délocalisé les bureaux de
vote ainsi que le matériel électoral. Jusqu'à 10h30 du matin, seulement 71% des
bureaux de vote étaient ouverts. La majorité des bureaux de vote observés dans
les districts d’Abidjan, Denguélé, Savanes, et Woroba étaient ouverts à 10h30
avec des délais substantiels constatés dans les autres districts. 21% des
bureaux de vote n’avaient toujours pas ouvert à midi, notamment dans les
districts des Lacs et Yamoussoukro.
Les 3 (trois) agents de la Commission Électorale
Indépendante sont présents à l’ouverture dans 68% des bureaux de vote. Dans 20%
des bureaux, aucun agent de la CEI n’a pu être présent avant midi.
Dans 3% des bureaux de vote, l’urne n’était pas disponible
au bureau de vote à l’ouverture. Les urnes en question ont été détruites la
veille ou n’ont pas pu être acheminées vers les bureaux. Dans 3% des bureaux,
des urnes qui n’ont pas été scellées correctement ont été observées.
Conformément aux mesures barrières contre la propagation de
la COVID-19, la CEI a annoncé la mise à disposition de masques et de gel mains
au niveau des bureaux de vote. Les observateurs de Indigo Côte d’Ivoire ont
rapporté que le gel hydro-alcoolique était disponible dans 74% des bureaux. Par
ailleurs, les agents électoraux ne portent pas les masques dans 18% des
bureaux.
Les forces de sécurité sont présentes dans les centres pour
68% des bureaux de vote.
En ce qui concerne le monitoring du discours de haine sur
les réseaux sociaux, nous avons relevé 137 discours de haine collectés dont 63
dans des groupes Facebook et 70 sur les pages Facebook individuelles. Ces
discours de haine apparaissent majoritairement dans les commentaires des
internautes et portent essentiellement sur les injures, les diffamations, les
menaces, les propos xénophobes, l'animalisation, les vœux macabres, des
attaques contre les communautés ainsi que les incitations à la révolte. Les principales
cibles sont les acteurs politiques toutes tendances politiques confondues.
Par ailleurs, le vocabulaire animalier utilisé s'est enrichi
avec de nouvelles expressions comme « cafard, fourmi, mouton, microbes et
serpents » pour désigner certains acteurs politiques ou des groupes de
personnes.
Quant au suivi de la désinformation en ligne, nos
observateurs ont remarqué que plusieurs images ont circulé sur Facebook faisant
le point de la situation dans certaines localités et bureaux de vote. Cependant
elles étaient contextuellement incorrectes. Par exemple, une image tendant à
présenter des électeurs devant un collège dénommé Anador, a été relayée comme
provenant de la commune de Yopougon, alors qu’il s’agit en réalité de la
commune d’Abobo.
Après la folle rumeur qui a envahi les réseaux sociaux sur
l’arrivée de Guillaume Soro en Côte d’Ivoire dans la journée du vendredi 30
octobre 2020, une fausse information diffusée dans un groupe généraliste ce
samedi 31 octobre 2020, a annoncé le vote de l’ex Président de l’Assemblée
nationale Guillaume Soro avec en illustration une image le montrant mettre un
bulletin dans une urne. L’image utilisée par l’auteur de la publication, qui
est disponible sur le site de l’Assemblée nationale, date de la présidentielle de
2015.
On a également constaté la diffusion d’allégations faisant
croire à l’arrestation de cyber activistes. Ces allégations provenant de
profils d’individus généralement de la même sensibilité politique ne sont pas
confirmées par les canaux des réseaux sociaux officiels de la Police à ce
stade.
A la mi-journée, INDIGO Côte d’Ivoire a enregistré et
vérifié 116 incidents.
Deux incidents de violence à l’encontre de nos observateurs
ont été enregistrés. A Gabéoua, dans le département de Guiberoua, un observateur
a été ligoté par les manifestants de l’opposition pour l’empêcher de se rendre
à son bureau de vote attribué. Des négociations ont eu lieu avec les autorités
de son village mais n’ont pas abouti. Néanmoins, il a réussi à s’enfuir mais a
été pourchassé jusqu’à son domicile et celui-ci a été saccagé. Actuellement, il
est en fuite dans la forêt avec toute sa famille. A Jacqueville, une
observatrice s’est vu arracher son paquet d’observation contenant les documents
nécessaires à son travail.
Des incidents de refus d’accès aux bureaux de vote de nos
observateurs ont été observés dans plusieurs localités pour 40 des observateurs
de Indigo Côte d’Ivoire, notamment à Fresco, Sassandra, Yamoussoukro, Bouaflé,
Guiglo, Attecoubé, Yopougon, San-Pedro, Abengourou, Aboisso, Adiaké,
Agnibilékro, Grand-Bassam, Gagnoa Guitry, Mbatto, Daoukro, Tiébissou, Akoupé,
Dabou, Toulepleu, Guiglo, Daloa, Mbengué. Néanmoins, après intervention auprès
des commissaires locaux et centraux, la consigne a été donnée aux agents des BV
et certains de nos observateurs ont pu réintégrer leurs bureaux de vote
attribués sauf pour les localités de Bouaflé, Dabou, Akoupé, Abengourou,
Attécoubé et Gagnoa. Indigo rappelle qu'une note circulaire a été fournie par
la CEI qui permet à ses observateurs d’être dans les bureaux de vote pendant
toute la journée.
Plusieurs cas d'empêchement d’ouverture des bureaux de vote
par les manifestants de l’opposition ont été enregistrés par exemple dans les
localités de Issia, M'batto, Yamoussoukro, Daoukro, Bongouanou, Arrah et
Abengourou en utilisant des barricades pour en empêcher l’accès. Dans certains
cas, pour assurer la continuité du vote, les bureaux ont été déplacés dans
d’autres quartiers (à Yamoussoukro par exemple), dans les locaux des
Sous-préfectures (à Gouetifla/Vavoua), ou, dans les brigades de gendarmerie à
Gregbeu (Zoukougbeu).
Plusieurs Commissions Électorales Locales et le matériel
électoral ont été saccagés à Zoukougbeu, Mbatto, Vavoua, Grand-Morié
(Agboville), Agou (Affery), Yakassé-Attobrou, Akoupé, Adzopé, Grand-Lahou,
Jacqueville, Bingerville, Anyama, Transua, Kouibly, Soubré, Buyo, Oumé, Gadouan
(Daloa), Bouaflé, Sinfra, Daloa.
Les recommandations:
Le Groupe de Plaidoyer PTI demande aux forces de sécurité de
jouer pleinement leur rôle quant à la sécurisation des opérations de clôture et
de dépouillement dans tous les lieux de vote où se déroule l’élection.
Le Groupe de plaidoyer PTI s’inquiète du fait du retard
excessif dans l’ouverture des bureaux de vote dans certaines localités, ce qui
est de nature à priver des électeurs de leur droit de vote. Le Groupe de
Plaidoyer appelle à prendre les mesures nécessaires pour procéder à l’ouverture
des bureaux de vote n’ayant toujours pas ouvert à midi.
Le Groupe de Plaidoyer PTI appelle les agents électoraux à
faciliter le travail des observateurs et leur assurer la présence durant toute
la journée dans les bureaux de vote conformément à la note circulaire accordée
par la CEI le 29 octobre 2020.
Les observateurs de Indigo Côte d’Ivoire continuent d’observer
les opérations dans leurs bureaux de vote et ce jusqu’au dépouillement.
Fait à Abidjan, le 31 Octobre 2020
Le groupe de plaidoyer PTI
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