Au deuxième jour de son procès en assises, mardi, Moïse Lida Kouassi, ancien ministre de la Défense de Laurent Gbagbo et ponte du Front populaire ivoirien (FPI) a dit sa part de vérité devant la cour. Morceaux choisis.
Moïse Lida Kouassi et trois autres co-accusés militaires sont poursuivis pour « complot contre l’autorité de l’État » s’est ouvert lundi devant le tribunal de Plateau, à Abidjan. Ils répondent de « complot contre l’autorité de l’État ».
« Dans le courant du mois de février 2012, la Direction de la surveillance du territoire (DST) recevait une information faisant état de la préparation d’un projet de déstabilisation du régime actuel [du président Alassane Ouattara, NDLR] par des officiers de l’armée en exil au Ghana, constitués en une plateforme militaire, avec l’implication de certains civils et hommes politiques proches de l’ex-président de la République [Laurent Gbagbo] ».
« On me considère comme un animal dangereux »
Dans un long exposé, Lida Kouassi s’est ainsi présenté à la cour : « Lorsque j’ai appris que j’ai été cité dans cette affaire, je suis tombé des nues. (…) Je suis enseignant-chercheur, vice-président du FPI et ancien ministre d’État. J’ai un doctorat en science politique avec une spécialité en défense et en stratégie. Mes adversaires politiques pensent que cette spécialité fait peur. Ils ont tendance à croire que je suis devenu un expert en coup d’État. Je vous invite à dissiper cela dans la tête de mes adversaires : je ne suis pas un expert en coup d’État ».
« Je voudrais ici dire haut et fort que je ne suis pas un assassin », a-t-il lancé. « Je n’ai jamais attaqué la République. Le complot contre l’autorité de l’État est un délit éminemment politique. Je suis devant vous en tant que prisonnier politique et c’est en tant que tel vous aller me juger. »
Plaidant non coupable, il a soutenu « n’avoir été associé à quoi que ce soit et dans aucun complot contre l’autorité de l’État. On me considère comme un animal dangereux qu’il faut mettre en cage pour dormir en paix, parce que ma spécialité fait peur ».
Lida Kouassi attaque la DST
Une fois de plus, la Direction de la surveillance du territoire (DST) a été au centre des critiques des accusés. A la DST, « ils trafiquent les dires et les documents et cela n’honore pas notre pays », a accusé Lida Kouassi.
« La DST a été démolie pour effacer les traces des traitements inhumains que nous avons subi là-bas. On m’a fait signer des documents que j’ai lu en diagonale, sous pression », a continué l’accusé, avant d’affirmer avoir été « détenu pendant quinze jours au secret à la DST, dans des conditions exécrables puis interrogé pendant onze jours ».
Il affirme également que son extradition « n’a respecté aucune règle ».
« Ce traitement cruel a porté atteinte à ma dignité. Je ne suis pas un assassin. Je n’ai jamais attaqué de poste frontaliers, ni de brigade. Ceux qui le font sont bien connus. J’ai été conduit à la prison de Bouna [Nord-Est, NDLR], à la Maca [Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan, NDLR], à Bouaké [Centre, NDLR] et à la Mama (Maison d’arrêt militaire d’Abidjan, NDLR)».
Des attaques qui ne sont pas sans rappeler celles adressées par Hubert Oulaye, un autre proche de Laurent Gbagbo, jugé et condamné à vingt ans de prison en décembre 2017, dans un autre dossier, en lien avec la crise postélectorale.
Les notes manuscrites
Ce n’est pas parce que l’on n’aime pas un pouvoir et que l’on écrit que l’on devient automatiquement un putschiste
Combatif, Lida a eu cependant du mal à expliquer les notes manuscrites, en rapport avec un plan de « communication de crise » et un « tableau de bord de transition », dont la mission était la mise sur pied d’un gouvernement civilo-militaire en Côte d’Ivoire, qui ont été retrouvées à son domicile de Lomé, au Togo, le jour de son arrestation, le 11 avril 2012.
« C’étaient des prises de notes. Ce n’est pas parce que l’on n’aime pas un pouvoir et que l’on écrit que l’on devient automatiquement un putschiste », s’est-il simplement défendu.
Lida Kouassi est également revenu sur ses connexions avec Justin Katinan Koné, ancien ministre de l’Économie de Gbagbo, dont le nom revient à presque tous les procès en rapport avec la crise postélectorale.
En novembre 2011, il répond à une invitation de Katinan, et se rend à son domicile en novembre 2011. Katinan voulait « faire le compte-rendu de ses tournées dans la sous-région en tant que porte-parole du président Laurent Gbagbo et nous donner des informations sur la situation du président », a affirmé Kouassi à la barre.
Mais il insiste : il a quitté les lieux rapidement. « J’ai quitté la réunion avant sa fin, parce des personnes étrangères avaient été invitées à prendre part à cette rencontre destinées aux anciens ministres exilés et aux présidents des coordinations politiques mises en place au Ghana », affirme-t-il, citant « le journaliste Ben Zahui, le pasteur Moïse Koré, l’avocate camerounaise, Me Lucie Bourtimieux. »
Le procès a été suspendu tard dans la nuit et doit reprendre ce jeudi, avec le réquisitoire du procureur.
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