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Société

Transport en commun : Ces véhicules qui parlent Abidjan

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photo d'archives

 La capitale économique ivoirienne, dans sa périphérie nord-ouest, Yopougon, la plus grande commune de Côte d’Ivoire; il est 8h30, ce lundi 25 juillet ;

le rond point du sous quartier Siporex grouille de monde, mais également d’engins de tous genres au nombre desquels des minicars de transport en commun communément appelés « gbakas » ainsi que des taxis compteurs et communaux. Sur leur fronton ou leur arrière, des écriteaux qui appellent à la réflexion. « La patience est un chemin d’or », « Qui ne risque rien n’a jamais rien », « L’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt », lit-on sur certains de ces véhicules. Des mots de réconfort et de gratitude « Ton tour arrive » « Dieu n’a pas encore dit son dernier mot », « Dieu seul sait ». Des éloges de personnalités et des équipes de renom dans le milieu sportif , telles « Didier drogba dit gbagbadèh », « Messi, le Dieu du foot », « Chelsea, Barcelone, la Roma ». Les stars de musique ne sont pas aussi ignorées, « Le même Fally », « Le Thémistocle d’Arafat».

Le tout couronné par des versets coraniques ou bibliques de tous genres (Colossiens 3, 17). Origines et impact sur les usagers Ces écriteaux, fait-on savoir, tirent leur origine de pratiques anciennes de propriétaires et de conducteurs de véhicules de transport en commun, et ne sont pas spécifiques à la Côte d’Ivoire. Dans nombre de capitales africaines, l’on est habitué à ces écriteaux pour lesquels les avis divergent quant à leurs fondements sociologiques et leur impact sur les usagers. Selon, M. Yedagne, Chargé de communication d’une mutuelle de la place et usager du transport en commun, ces écriteaux tirent leurs sources de croyances religieuses « Le chrétien qui a son véhicule n’acceptera pas un écriteau tel ‘’Allah le miséricordieux’’. Il dira plutôt par exemple que ‘’Jésus est seigneur », justifie-t-il. Isabelle Bobou épouse Nyamien, Assistante de direction, pense que cette pratique résulte du fait que les Africains sont très expressifs dans tous les domaines. Ces dénominations traduisent souvent un vécu, une reconnaissance que l’on veut exprimer au travers des véhicules, exemple ‘’Allah merci’’. « C’est aussi un souci de partage des choses qui tiennent à cœur ou l’envie de montrer son attachement à une personne ou à une croyance en valorisant son nom », ajoute-t-elle. Sangaré Souleymane, chauffeur de taxi compteur, estime cette pratique répond à un souci d’esthétique. « Dans notre jargon, on parle de maquillage, c’est une manière de rendre la voiture plus attrayante, afin d’attirer la clientèle », confie-t-il tout en relevant que le contenu des messages diffusés relève du fanatisme et de la foi. « Ces écriteaux sont une façon pour nous de célébrer nos idoles. Il y a aussi des messages liés à la divinité qui nous permet d’implorer la protection divine », révèle-t-il. « Ces écriteaux font tendance. Ils valorisent et apportent le soutien et le réconfort aux passagers », croit, pour sa part, Bandaogo Issoufa, chauffeur de gbaka. Des messages qui ne reflètent pas le comportement des conducteurs.

Le secrétaire général de la coordination des gares routières, Soumahoro Yaya, évoque l’effet de mode qui pousse les chauffeurs à l’insu des propriétaires à écrire sur leurs véhicules. « N’importe qui se lève pour écrire n’importe quoi sur les voitures. Et ce qui m’écœure, ces messages ne reflètent pas le comportement de ces chauffeurs», fustige-t-il. L’avis d’un sociologue Pour le socio-anthropologue, Pr Martin Amalaman, ces écriteaux sont des effets de mode, à l’instar des tatouages sur le corps humain, et participe au paysage publicitaire et à l’embellissement à l’africaine, du « folklore visuel urbain. « Ils traduisent des croyances (in challah, Dieu est grand, vierge Marie, etc), des sentiments de sympathie (pour une star ou une personnalité), des citations, des proverbes, une idéologie, des campagnes de sensibilisation sur des fléaux sociaux etc. », ajoute-il. Pr Amalaman évoque également l’idée de canaux d’expression et de formes de représentation du vécu quotidien et des souffrances des acteurs du « bas peuple » (la classe pauvre). « Une sorte de tribune offerte à cette classe au bas de la société, pour se faire entendre », conclut-il. Une forme d’exutoire ou simple effet de mode, les conducteurs s’adonnent à cœur joie en embellissant leurs véhicules par des adages, versets bibliques et coraniques, des éloges à leurs fans tant du milieu sportif que du showbiz.

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