Le polémiste et militant anticolonialiste Kemi Seba a été expulsé mardi soir de Côte d’Ivoire, où il devait animer dimanche une conférence « contre le néocolonialisme ». Au cours des derniers mois, il avait violemment critiqué Alassane Ouattara pour sa défense du franc CFA.
Après le Sénégal, la Guinée et le Togo, c’est au tour de la Côte d’Ivoire de déclarer l’activiste Kemi Seba persona non grata sur son territoire. Arrivé samedi 23 mars à Abidjan, le Franco-Béninois s’est de lui-même présenté, mardi dans l’après-midi, aux services de la police ivoirienne qui retenaient plusieurs membres de son équipe, quelques heures plus tôt.
Après avoir été interrogé par les services de sécurité ivoiriens, Kemi Seba – qui voyage avec un passeport béninois – a été contraint d’embarquer dans la soirée sur un vol d’Air Côte d’Ivoire à destination de Cotonou, où il est arrivé dans la nuit.
Mobilisation anti-franc CFA
Parmi les militants arrêtés en début d’après-midi, Hery Djehuty, coordinateur stratégique de l’ONG Urgences panafricaniste, que préside Kemi Seba. Bras droit du polémiste controversé, ce dernier a été interrogé de 15 heures à 20 heures. « On m’a interrogé sur ma relation avec Kemi, sur l’objet de notre ONG, sur la manifestation prévue dimanche… Puis j’ai signé ma déposition et on m’a relâché », témoigne-t-il.
À Cotonou, Kemi Seba a été interpellé par les services de police dès sa descente de l’avion, assure Hery Djehuty. Mercredi en fin de matinée, il n’avait pas encore repris contact avec ses proches. Selon nos informations, il était entendu par les services de renseignement béninois.
La veille de son arrestation, il avait rencontré à Abidjan le chanteur Alpha Blondy. Dimanche 31 mars, il devait animer un meeting « contre le néocolonialisme » organisé par son ONG. Parmi les thèmes qui devaient être abordés : la lutte anti-franc CFA, leitmotiv d’Urgences panafricanistes, au lendemain de la réunion des ministres des Finances de la zone franc, prévue les 27 et 28 mars à Niamey.
e meeting devait se tenir dans la salle du Baron, à Yopougon, un haut lieu des mobilisations pro-Gbagbo, dans ce fief de l’ancien président ivoirien. Kemi Seba devait d’ailleurs rencontrer Simone Gbagbo mardi à 17 heures. Une rencontre avortée du fait de son arrestation.
Alassane Ouattara, cible privilégiée
Le président ivoirien est l’une des cibles privilégiées de Kemi Seba dans son combat contre le franc CFA, dont il a fait l’un de ses principaux chevaux de bataille. Après les déclarations d’Alassane Ouattara, mi-février, en faveur de cette monnaie commune à 14 pays africains, Kemi Seba avait ainsi publié un billet au vitriol sur sa page Facebook, qualifiant le président ivoirien d’« esclave volontaire ».
Dans une vidéo publiée sur Facebook quelques minutes avant de se présenter dans les locaux de la police, l’activiste affirmait être « venu en paix, légalement », dans le cadre d’une « mobilisation pacifique contre le néocolonialisme ». « Vous me mettez en prison, je ressors plus fort. Vous m’expulsez d’un pays, je ressors plus fort », a-t-il par ailleurs martelé.
Expulsé du Sénégal en 2017, après avoir créé la polémique en brûlant un billet de 5 000 francs CFA lors d’une mobilisation, l’activiste a depuis eu maille à partir avec les autorités de plusieurs pays dans lesquels il souhaitait se rendre. En mars 2018, il ainsi été refoulé de Guinée, où il devait participer à une conférence. En août 2018, c’est au Togo qu’il a été refoulé.
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