Le Conseil des droits de l'homme de l’ONU va envoyer des experts en RDC, plus particulièrement dans la région des Kasaï. Une zone où depuis un an des violences ont fait plus de 3000 victimes. Des experts, mais pas de commission d'enquête internationale indépendante, comme certains pays européens le demandaient. Au final, c’est un compromis avec les pays africains qui a été adopté.
« Nous espérions que cette résolution serait plus forte », le représentant des Etats-Unis au Conseil des droits de l'homme l'a dit très clairement ce vendredi matin. Idem du côté de la représentante des pays européens. Le consensus adopté par les 47 Etats membres est bien plus faible que la proposition de départ : celle d'ouvrir une mission d'enquête internationale et totalement indépendante. C'est d’ailleurs le principal regret des défenseurs d'une résolution forte : la disparition du concept en tout cas du mot « indépendance » des enquêteurs dans les textes.
A la place, une formulation floue qui demande à ces experts internationaux d'établir les faits et d'identifier les auteurs des terribles violences dans les Kasaï, mais aussi coopérer avec les autorités congolaises. Quels sont les termes exacts de cette coopération et à quel point ces experts vont-ils pouvoir travailler librement ? Le texte de la résolution ne répond pas à cette question.
La RDC garde la main sur l’enquête
Enfin autre interrogation : de quelle ressource financière et de quel accès cette équipe va-t-elle disposer pour mener l'enquête à grande échelle qui l'attend avec plus 42 fosses communes découvertes et plus de 3 500 civils tués ? Car c'est la principale difficulté rencontrée par l'ONU jusqu'à présent, celle d'avoir accès à la région des Kasaï et aux lieux où les crimes ont été perpétrés. Les employés de l'ONU font à ce jour face à des entraves quasi quotidiennes qui les empêchent de mener des enquêtes approfondies dans cette région.
Aujourd'hui, à Genève, les autorités congolaises se sont engagées à accueillir sur son sol ces experts internationaux. Mais elles ont déjà dit que pour elle cet appui serait uniquement technique ou logistique, car la République démocratique du Congo compte bien garder la direction des enquêtes en cours.
« Le gouvernement de la République démocratique du Congo accepte d’accueillir sur son sol une équipe d’enquêteurs des Nations unies venant en appui à la justice congolaise dans le but de faire la lumière sur les atrocités du Kasaï. Mais cet appui sera technique ou logistique et la justice congolaise gardera le leadership de ces enquêtes comme cela a été souligné dans le courrier adressé au haut-commissaire le 9 juin dernier », a effet déclaré le représentant congolais.
Que la RDC garde la direction des enquêtes, c'est ce qui inquiète certains défenseurs des droits de l'homme. Car pour ces organisations, c'est problématique que les autorités congolaises, qui sont elles-mêmes accusées d'usage excessif de la force, soient impliquées dans l'enquête. « Comment être juge et partie ? », s'interroge la Fédération internationale des droits de l'homme, par exemple, qui parle d'une résolution a minima qui risque « de ne pas suffire à empêcher les massacres ». Pour elle, seule une enquête totalement indépendante peut faire la lumière sur ce qui s'est passé.
Le haut-commissaire aux droits de l'homme de l'ONU se dit satisfait par cette résolution qui « envoie un signal fort aux perpétrâtes des violences ». Il assure que ses experts vont enquêter en toute indépendance de la justice congolaise. Une lecture différente que celle que font les autorités congolaises de la même résolution. A voir donc comment ces experts internationaux vont pouvoir enquêter dans les Kasaï.
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