Les attaques contre les enfants et les enlèvements d’enfants dans certaines parties de l’Afrique de l’Ouest et du Centre suscitent de profondes inquiétudes à l’UNICEF. Le dernier épisode de cette longue série est intervenu le 5 juillet dernier quand 150 élèves auraient été enlevés dans une école de l’État de Kaduna, au Nigéria.
« Cela constitue le dernier incident en date d’une série alarmante d’attaques contre des enfants et d’enlèvements, notamment d’élèves, dans certaines régions d’Afrique occidentale et centrale », a déclaré mercredi dans un communiqué, Henrietta Fore, la Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF).
L’ONU estime qu’au moins 950 élèves ont été enlevés de leurs écoles par des hommes armés depuis décembre dernier au Nigéria. Rien qu’au cours des six dernières semaines, près de 500 enfants ont été enlevés lors de quatre incidents distincts dans le centre et le nord-ouest du pays.
Selon l’UNICEF, beaucoup de ces enfants n’ont pas encore été libérés. « Il est difficile d’imaginer la douleur et la peur que ressentent leurs familles et leurs proches en leur absence », a ajouté Mme Fore, relevant qu’il ne suffit pas « de condamner ces crimes, pas quand des millions d’enfants sont confrontés à une crise de protection qui s’aggrave ».
Au Sahel central, les auteurs ont pris pour cible des familles qui allaient chercher de l’eau
Au Niger voisin, des attaques contre des enfants, des familles et des écoles ont également lieu. Depuis le début de l’année, des groupes armés ont tué près de 300 personnes, dont 45 enfants, lors d’assauts coordonnés contre des villages des régions de Tillabéry et de Tahoua.
Dans certains de ces incidents au Sahel central, les auteurs ont pris pour cible des familles qui allaient chercher de l’eau. Selon l’UNICEF, jusqu’à 80% des enfants vivant dans les zones les plus touchées par la violence ont besoin d’un soutien psychosocial en raison de la détresse qu’ils éprouvent.
Plus largement, l’agence onusienne s’inquiète du fait que, comme par le passé, les groupes armés non étatiques et les parties au conflit au Burkina Faso, au Cameroun, en République centrafricaine, en République démocratique du Congo (RDC), au Niger et au Nigéria vont intensifier ces activités violentes au cours des prochaines semaines, à l’approche de la saison des pluies, lorsque leurs mouvements pourraient être limités par les inondations. « Ces incidents semblent être de plus en plus fréquents, ce qui fait craindre pour la sécurité et le bien-être des enfants de la région », a fait valoir Mme Fore.
En 2020, 1 enfant sur 3 victimes d’abus graves se trouvait en Afrique de l’Ouest et du Centre
Déjà en 2020, selon le dernier rapport du Secrétaire général des Nations unies sur les enfants et les conflits armés, 1 enfant sur 3 victimes de violations graves se trouvait en Afrique de l’Ouest et du Centre. Au Burkina Faso, cela se traduit par des attaques contre les civils et autres violations du droit international humanitaire, qui ont connu « un pic significatif ces dernières semaines ».
Le 5 juin, au moins 130 civils ont été tués lors d’une attaque qui a duré des heures contre un village de la province de Yagha. Il s’agissait de l’attaque la plus meurtrière dans le pays depuis le début des violences en 2015.
Jusqu’à présent ce mois-ci, 178 civils ont été tués, dont des enfants. Plus de 1,2 million de personnes, dont 61% d’enfants, sont aujourd’hui déplacées en raison des violences, soit dix fois plus qu’au cours des trois dernières années seulement.
Au Cameroun, des membres d’un groupe armé ont attaqué un centre religieux à Mamfe le 6 juin, tuant un garçon de 12 ans et blessant un autre de 16 ans. Les attaques contre des civils, les enlèvements et les meurtres d’écoliers et d’enseignants sont en augmentation dans le nord-ouest et le sud-ouest du pays. L’UNICEF estime qu’un million d’enfants camerounais ont besoin d’être protégés contre la violence.
Le nombre d’enfants tués ou mutilés est 7 fois plus élevé au début de 2021 que vers la fin de 2020 en RCA
Au cours du premier trimestre de cette année, il y a eu également « une augmentation écrasante des violations des droits de l’enfant à travers la République centrafricaine, dans un contexte d’insécurité et de tensions croissantes liées aux élections générales de 2020 ». Les cas enregistrés de violences sexuelles à l’encontre des filles ont presque quintuplé entre le dernier trimestre de 2020 et le premier trimestre de 2021 – passant de 10 à 49.
Le nombre d’enfants enregistrés comme tués ou mutilés était également sept fois plus élevé au début de 2021 que vers la fin de 2020. Dans le même temps, les attaques ou occupations d’écoles et d’hôpitaux sont passées de 30 à 44 sur la même période.
En RDC voisine, au cours du seul premier trimestre 2021, ce sont plus de 3.400 violations qui ont été recensées l’encontre des enfants, telles que le recrutement dans des groupes armés, les enlèvements et les meurtres. Cela représente 64% du nombre total de violations vérifiées pour toute l’année 2020.
La région est au bord de la « catastrophe »
Face à ce sombre tableau, l’UNICEF note que les enfants qui vivent dans ces zones ont besoin d’une action concertée pour pouvoir vivre en toute sécurité, aller à l’école ou chercher de l’eau sans craindre d’être attaqués ou enlevés à leur famille. « Cela commence par les groupes armés non étatiques et toutes les parties au conflit qui commettent des violations des droits de l’enfant », a indiqué Mme Fore.
Selon l’agence onusienne, des différentes parties ont l’obligation morale et juridique de cesser immédiatement les attaques contre les civils, et de respecter et protéger les civils et les biens civils pendant toute opération militaire. De son côté, « la communauté internationale a également un rôle important à jouer ».
Il s’agit pour les pays donateurs d’augmenter leurs contributions afin que l’UNICEF puisse étendre son travail pour réduire les vulnérabilités des enfants et augmenter leur résilience pour les mettre à l’abri du danger. « Tous les efforts doivent être faits pour inverser la spirale de la crise de protection des enfants alors que la région est au bord de la catastrophe », a conclu la cheffe de l’UNICEF.
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