En plein centre de la ville de Divo, dans les encablures de l’hôpital général et la morgue se trouve un espace habité. Ces habitations n’ont pas l’aspect de constructions récentes. C’est surtout cet aspect d’espace d’une certaine époque qui attire les regards des passants. Presqu’au milieu de ces vieilles bâtisses se dressent deux gros manguiers qui pourraient à eux seuls raconter l’histoire de cet espace. C’est surtout à l’ombre de ces arbres que tout se raconte, tout se fait et……. Tout se mange.
Parce qu’au fil des années est né ici un restaurant, disons pour épouser le langage local ivoirien, un maquis. Comme tous bons maquis de Côte d’Ivoire, il a construit sa réputation sur la consommation de la viande de brousse. Un commerce pas spécialement juteux mais tout de même rentable qui permettait à ses acteurs de joindre les deux bouts. Tout se passait donc assez bien lorsqu’est arrivé la ‘’ maudite histoire de l’Ebola’’. Cette maladie mortelle qui a endeuillé plusieurs pays limitrophes de la Côte d’Ivoire. Indexée comme vecteur et propagateur de la maladie la viande de brousse est interdite de chasse, de manipulation et de consommation dans le pays.
« Au début les chefs (Ndr autorités et responsables de la santé) étaient chaud. Ils fouillaient même dans nos sauces pour chercher viande de brousse. Si on t’attrape, tu es mort. Mais tout ça c’est fini maintenant. On vend notre chose et les clients viennent nombreux », témoigne une restauratrice.
Elle indique une table bien retirée sous un des manguiers. Il s’agit de quatre gaillards attablés avec trois jeunes demoiselles aux tenues suggestives. Il faut vraiment s’habiller de la sorte pour venir juste manger. Bref, elles ont peut-être un autre agenda plus secret après avoir fait bombance. Devant eux deux plats fumants et trois bouteilles de vin de table.
« Ils ont commandé agouti depuis trois jours. Ils ont même menacé de fermer mon maquis si je ne m’exécutais pas. Au début de la campagne c’est eux qui nous traquaient et versaient nos marchandises quand ils y trouvaient de la viande de brousse. Maintenant c’est avec eux qu’on fait nos recettes », ironise-t-elle.
Selon elle, la clientèle a doublé voire triplé. Parce que les hommes aiment bien les interdits. Des groupes informels de consommateurs se sont formés et passent des commandes pour de la viande de biche, d’agouti ou de hérisson.
Quartier Gremian, autre lieu, même décor. Un groupe d’élèves s’adresse à une tenancière. « Maman on veut mourir ». « Mes enfants c’est poisson poilu (Ndr agouti) seulement qui peut vous tuer ici. Les clients finissent par se faire servir trois plats qu’ils dégustent avec appétit. Leur dernier repas avant quitter ce monde puisque Ebola est mortel. Après avoir broyé tous les os, ils poursuivent sur un ton humoristique.
« Si on vient demain c’est que Ebola est vaincu », lancent-ils en chœur en guise d’au revoir. « Amen » répond tout simplement la vendeuse avant que tous n’éclatent de rire.
‘’Gremian’’, ‘’Au serpent’’, ‘’ chez Jokiki’’, à Divo les endroits pour consommer la viande interdite ne manquent pas. Les choses se font presqu’au su de tous.
« Tant qu’il n’y a pas de drame on s’accommode. Mais le jour où on annoncera un décès quelconque pour cause d’Ebola on ne serrera même plus les bras encore moins les accolades », affirme un leader de jeunesse.
En effet dans la lutte contre Ebola il n’y a pas que la consommation de la viande de brousse qui est interdite. Au début les accolades et certaines formes de salutations étaient bannis. Mais tout cela a vite été oublié. Dans les églises et temples on se donne la paix du christ parque dit-on Jésus a déjà béni. Même attitude dans les mosquées. La consommation de la viande de brousse n’est donc que la cerise sur le gâteau. Vendeuses chasseurs et consommateurs se frottent les mains. Les chasseurs parce que le demande est très forte. Restauratrices en raison de ce que les chasseurs pour ne pas se faire prendre bradent presque le gibier. Les clients enfin parce que les morceaux ont grossi dans les sauces.
« On ne sait jamais, comme c’est interdit on fait gros pour que les gens prennent vite et que ça ne pourrissent pas avec nous », explique une restauratrice.
Au cours d’une récente réunion présidée par le secrétaire général 2 de préfecture, Abo Kouadio Anderson, les agents des Eaux et forêts ont juré la main sur le cœur que la lutte continue. Idem pour le personnel de la santé. Leurs actions si elles existent semblent bien discrètes. Car c’est bien repu, que ces amateurs quittent les maquis spécialisés de Divo avec l’assurance de manger encore plus de viande interdite le lendemain. Le virus Ebola est vraiment bien inspiré de se garder de franchir les frontières ivoiriennes.
1 Commentaires
Anonyme
En Juin, 2016 (14:22 PM) ah nos cousins et amis ivoiriens!!!! ils sont tous mbaye, samba, camara, wade, sylla, etc.., pour rien au monde, ils ne peuvent pas renoncer au biiirrrrrr!!!!! parole d'un cisseParticiper à la Discussion
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