Sauf changement de dernière minute, le procès de l'ancien chef de l'Etat ivoirien Laurent Gbagbo et de son ancien ministre de la Jeunesse, Charles Blé Goudé, interrompu depuis quelques mois, devrait pouvoir reprendre le lundi 1er Octobre 2018 à la cour pénale internationale (CPI) à La Haye.
Dans une contribution publiée sur le site de l’IVERIS qu'elle dirige, Leslie Varenne essaie d'apporter quelques éclairages sur le procès qui reprend le lundi prochain à La Haye. L'ex-journaliste d'investigations, releve que contrairement à la doxa qui prétend que cette audience du 1er octobre sera consacrée à une demande d’acquittement des deux inculpés, il s'agit plutôt d'un non-lieu. «Ce n’est pas une requête en acquittement mais une requête aux fins d’un non-lieu total», précise-t-elle d'entrée de jeu. La spécialiste indique que l’accusé ne peut être acquitté que par un verdict intervenu à la fin d’un procès à l’issue duquel la Cour considère soit qu’il n’y a pas lieu à condamnation soit qu’il subsiste un doute. Le non-lieu, lui, est un abandon des poursuites en cours de la procédure lorsque la qualité de la preuve n’est pas suffisante pour permettre raisonnablement la poursuite du procès.
«L’audience du premier octobre pourrait être prolongée pendant plusieurs jours. Les juges peuvent décider d’un non-lieu total, ce qui ne signifierait pas pour autant, aux yeux de la justice internationale, que les inculpés sont innocents, mais que le procureur n’a pas apporté des preuves de qualité suffisante pour poursuivre le procès. Ainsi, et dans l’absolu, le dossier pourrait être rouvert si des éléments probants étaient découverts. En revanche, ce qui est certain, c’est que même dans le cas-de non-lieu total, la décision des juges sera mise en délibérée, il faudra donc attendre a priori entre un et quatre mois avant de connaître le verdict.C’est seulement à ce moment-là que les prisonniers pourront recouvrer leur liberté à condition toutefois que la procureur ne fasse pas appel de la décision des juges. Cet appel aurait pour conséquence de suspendre la décision des juges en attendant une nouvelle décision », explique Leslie Varenne.
Selon l'auteur de ''Abobo la guerre, Côte d’Ivoire terrain de jeu de la France et de l’ONU'', Charles Blé Goudé et Laurent Gbagbo peuvent néanmoins bénéficier d’une libération provisoire dans un pays tiers, à condition que leurs avocats respectifs déposent une demande en bonne et due forme. «Ils seront alors soumis à des régles très strictes fixées par la CPI et ne pourront pas rentrer en Côte d’Ivoire tant que le verdict définitif n’aura pas été prononcé », apprend-elle. Autrement, les juges peuvent également décider d’un non-lieu partiel pour l’un ou l’autre des prévenus, ou les deux ; dans ce cas, le procès reprendrait alors son cours. Mais là encore, Leslie Varenne reste perplexe.« Comment reprendre le long fleuve de ce procès irrationnel et faire durer ce théâtre de l’absurde pendant encore un, deux, voire trois ans ? », s'interroge-t-elle.
Puis d'ajouter: «Donald Trump et John Bolton ont programmé la fin de la CPI, mais Fatou Bensouda pourrait fort bien reprendre à son compte le proverbe ivoirien « cabri mort n’a pas peur du couteau » et exécuter les engagements qu’elle a pris, depuis sept longues années, en inculpant à son tour le camp Ouattara. Des dossiers concernant le massacre du peuple Wé, notamment celui de Duékoué le 28 mars 2011, sont instruits. Mettra-t-elle ses promesses à exécution ? Pour l’instant, personne n’est en capacité de le dire. En revanche, ce qui est certain, c’est qu’une épée de Damoclès pèsent toujours au-dessus des têtes des responsables de ces crimes… », prévient la co-fondatrice et directrice de l’IVERIS.
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